27 avril 2008
Biyanvrac est de l’espèce des perplexes. Dès l’instant que, face à une problématique, il trouve la moindre faille, le moindre pet de mouche qui irait à l’encontre de ce qu’il pense être du bon sens, sa cervelle fébrile s’engouffre, va, fonce, et veut trouver la sortie. Parfois, il n’y en a pas, de sortie, que c’est une vraie misère.
Par exemple, il y a les aérodromes contrôlés, par exemple.
Le Gédéon, il cause pas des aéroports, pleins de gros avions qui viennent de loin chargés de touristes rougeâtres et bedonnants, et que pour les balader en sécurité, les touristes, il faut des types qui disent au conducteur de l’avion quoi faire où aller, quand virer et tout, qu’ils ont des écrans avec des petites lumières qui brillent et préviennent si des vont se rentrer dedans. Non, on parle ici de l’aérodrome de base, destiné aux pilotes du dimanche, les ceux qui, la drôle d’idée, volent pour le loisir. Et alors bon, selon l’intensité supposée ou avérée du trafic, les chefs décident que là, ici, il faut des contrôleurs. Ceux-là, c’en est des qui te disent comment faire ce que tu voulais faire. Par exemple, le Gédéon, disons, se pointe. Pas lui, parce que le bois tout ça, mais il sait comment ça se passe, donc supposons. Alors bon, il se pointe, cause dans le poste la langue spéciale de ces gens-là qu’on en recausera un autre jour, et dit ce qu’il veut faire. Par exemple, il veut se poser, le Gédéon, pour, disons, boire un canon. Imagine qu’il se pose sur un terrain sans contrôle. Il s’intègre, vent arrière tout ça, regarde bien tout au long du truc s’il ne dérange pas, se pose, et dégage la piste. « A voté ! » Un aérodrome contrôle, c’est tout pareil, sauf qu’un type te dit au fur et à mesure de faire tout ce que t’aurais fait très bien tout seul s’il n’avait pas été là, le gars. Voilà. Et aussi, pendant que tu fais ce qu’il dit de faire, il faut que tu dises, au fur et à mesure toujours, que tu fais bien tout comme il a dit. En gros donc, si c’est contrôlé, tu fais ce qu’on te dit, et tu dis que tu fais ce qu’on te dit de faire. Si c’est pas contrôlé, tu fais ce que t’as à faire, et personne t’emmerde. Bon. Alors après, sinon, ils ont inventé que si c’est pas contrôlé, tu dis quand même ce que tu fais à tout le monde, que ça fait chier grave et c’est le bordel, qu’il n’y a plus le monsieur loyal qui dit à qui le tour.
Alors bon, c’est pour la sécurité, que plus y’a de monde moins y’a de riz, donc il faut assurer l’espacement, tout ça…ok. Et du coup, ils ont dit qu’à partir de désormais, tout autour de l’aérodrome et à des kilomètres, c’est contrôlé aussi, et que si tu passes juste par là pour aller voir un pote, mais que tu te poses pas ni rien, tu fais quand même comme il dit de faire que t’aurais fait tout seul sans lui. Une CTR, ça s’appelle, que maintenant, crac, elles sont toutes contrôlées, les CTR, qu’on va pas se laisser emmerder par des culs-terreux qui volent pour le loisir !
Mais alors, regarde bien : « un aérodrome n’est contrôlé que pendant les heures d’ouverture du service ».
La France est un pays qui protège et soigne ses travailleurs. C’est bien, sans doute, qu’il dit, le Gédéon. Le seul problème, c’est que c’est contraignant et coûteux, de protéger ses travailleurs, et vu que dans le même temps, il est permis aux patrons d’aller voir ailleurs, ils y vont, tiens, voir ailleurs. Pas bien longtemps, parfois, mais c’est pas le sujet. Sauf le premier patron de France, qui est l’Etat. Il n’a pas encore osé, lui, faire travailler les pauvres qui ferment leur gueule…en attendant, il fait bosser les pauvres qui ouvrent leur gueule. Du coup, bien obligé, qu’il est, l’Etat, de faire avec les 35 heures, les RTT, les arrêts maladie de trois semaines au moindre ongle incarné, tout ça. Et alors bon, les ceux qui contrôlent, dans les tours de, ils travaillent pas le week-end, que c’est dans la convention collective ! Le celui qui vole, lui, et dont le patron n’est pas encore allé voir ailleurs, c’est tout pareil, il ne travaille pas le week-end, mais la semaine. Du coup, la semaine, pendant qu’il travaille, il ne vole pas, mais sa sécurité est assurée, sur son aérodrome contrôlé, car les ceux qui contrôlent travaillent aussi ! Et il est bien content de le savoir, le gars. Par contre, le week-end, quand il vole, lui, comme les dizaines de travailleurs dont les patrons tout ça, le contrôle, y’a plus ! L’aérodrome contrôlé ne l’est que pendant les heures de travail, c'est-à-dire quand il n’y en a pas tellement besoin, si on admet l’idée que ce serait un besoin. De deux choses l’une, qu’il dit, le Gédéon. Soit le contrôle sert en effet à améliorer la sécurité, auquel cas il convient qu’il soit actif quand le trafic est le plus important, c'est-à-dire les week-ends, soit ce système ne sert qu’à maintenir des emplois, auquel cas il vaudrait peut-être mieux les employer ailleurs, que les pauvres ils doivent s’emmerder puissance dix mille, à regarder passer les cigognes… « ça n’a pô d’bon sein », comme disent les québécois…
Il y a aussi quelques aérodromes qui sont contrôlés tout le temps, ça existe, mais pas tant que ça, si tu regardes...
Sinon, le contrôle, donc, c’est la sécurité. Ceux qui disent ça ne sont pas des crétins, ils ont fait des écoles pour et tout. Ils disent aussi que le fait de faire ce qu’on te dit de faire, plutôt que d’avoir à décider tout seul, te décharge d’un grand stress, et que du coup t’es tout zen et heureux, tout ça. Sauf que, les pilotes ULM, condamnés qu’ils sont à stresser toute leur vie que « c’est bien fait pour eux ils veulent pas qu’on la leur tienne », interdits, les ULM, sur les aérodromes contrôlés. La plupart, si. Sauf s’ils consentent à ressembler à des avions. Les autres, là, en câbles, à dégager ! Voilà. Punis.
Des questions ?
Si tu veux savoir, le Gédéon, il fait le tour de son bois tout seul, histoire de contrôler lui-même que personne ne vienne l’emmerder, et il est bien content avec ça, merci.