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Paul Dellac

Article paru dans ULMiste n°7, décembre 2011

 

Paul Dellac

 

S’il a un nom prédestiné à la pratique de l’ULM hydro sur les lacs de son Aveyron natal, Paul a aussi bien d’autres choses à dire… allons voir.

 

ULMiste : comment es-tu venu à l’aviation ?

 

Paul Dellac : mon parcours aéronautique, qui n’a rien d’exceptionnel, commence en 1972. Passionné de mécanique depuis tout petit, je rentre à l’âge de 20ans dans l’Armée de l’air pour y apprendre le métier de mécanicien avion puis de mécanicien naviguant. J’effectue 4000 heures de vol sur avion Transall au Centre d’Instruction des Equipages de Transport de Toulouse-Francazal. C’est en 1980, lors d’un meeting aérien, que je découvre l’ULM pendulaire. Je suis conquis par la démonstration et le week-end suivant je fais un baptême qui confirme mon impression. Un mois plus tard je passe la théorie qui était alors celle du vol à voile mais je devrai ensuite attendre dix ans pour commencer la formation pratique.

En 1985 mon travail m’emmène à l’Ile de la Réunion pour deux ans avec ma famille. Ce sont sans aucun doute les deux meilleures années de ma vie. Deux années paradisiaques au cours desquelles notre seul travail consiste à ravitailler en Transall les îles éparses autour de Madagascar. Lors d’un passage à Mayotte j’ai l’occasion de faire un vol en Baroudeur, c’est mon premier vol en multiaxes. En 1990 je quitte l’Armée de l’Air pour rentrer en sous-traitance chez Airbus en tant qu’inspecteur qualité sur les chaînes de montage des A320 puis A 330/340. C’est alors que je commence ma formation ULM multiaxes au club de Muret, près de Toulouse. Dans la foulée je fais l’acquisition du Weedhopper AX3 sur lequel j’ai été formé. En 1992, au cours d’un voyage en Guadeloupe, je fais un baptême hydro avec un Maestro, ce sera le déclic pour cette discipline. En 1997 je passe mon brevet instructeur au club de St Exupéry. C’est là que j’ai le plaisir de recontrer “votre serviteur” Pierre-Jean le Camus. Je débute mon activité d’instructeur au sein du club de Muret avec mon AX3 à moteur Rotax 503 que je revends ensuite à un élève pour acheter le Weed Evasion 582, celui-là même qui est aujourd’hui sur flotteurs. En 2001 j’achète l’un des premiers kits de Savannah.

 

ULMiste : lequel Savannah sera le premier en 582, avant le Bingo.

 

Paul Dellac : oui, pour une raison de budget je l’équipe d’un moteur 582 alors que la version 2 temps n’existe pas encore chez ICP, mais ils étaient en train de la préparer au même moment, ce que j’ignorais au départ. Avec ce moteur, il deviendra le Bingo.

 

ULMiste : puis vint ton implication associative.

 

Paul Dellac : en effet, à cette même période je participe à la création du club ULM d’Airbus (Club Aéroplum) qui a pris aujourd’hui son régime de croisière en partenariat avec le club ULM de St Lieux-lès-Lavaur. En tant que secrétaire du Comité Régional ULM Midi Pyrénées dont Michel Marque est le président je m’attache à organiser des petits rallyes touristiques en ULM dans notre région avec le concours du Club de Muret. Huit rallyes seront ainsi organisés avec pour thème le survol d’un certain nombre de villages classés “plus beaux villages de France” puis repas et bivouac dans un club qui nous accueille. Mais si je me suis installé dans la région toulousaine pour raison professionnelle, je n’en demeure pas moins attaché à l’Aveyron où j’ai conservé la maison familiale. J’y ai crée une piste ULM pour y effectuer des baptêmes pendant l’été mais j’ai du la fermer quelques années plus tard pour cause d’implantation d’éoliennes. En 2004 j’intègre l’aéroclub de Cassagnes-Begonhès. En 2005 nous y organiserons une étape du Tour ULM. En 2006 je m’engage auprès de mon ami Jean-Paul Burgues à la création du club “les Citoyens du Ciel”  qui a  vocation de faire voler des handicapés. Ce sera le début d’une grande aventure qui commencera par un tour du Maroc avec 2 ULM (le Sky Ranger piloté par Bruno Gehu et mon Bingo). En 2008 nous ferons le tour d’Espagne  avec les mêmes  machines. Faute de disponibilité j’ai du abandonner provisoirement ces rallyes appelés “Les Ailes Du Partage”. L’année 2007 sera pour moi le départ d’une grande aventure, celle de l’hydro.

 

ULMiste : oui, parle-nous de l’ULM sur flotteurs !

 

Paul Dellac : en 2007 donc, alors que je recherche une nouvelle piste terrestre près de Villefranche-de-Panat, je rencontre le maire pour lui expliquer ce projet et au cours de la conversation je lui lâche  “l’idéal ce serait sur l’eau”. Et voilà que par ces quelques mots les choses prennent une toute autre tournure. M. Raynal me rétorque “et pourquoi pas ?” et s’enflamme aussitôt pour le projet. Il me propose d’utiliser le hangar d’un ancien centre nautique appartenant à la municipalité pour remiser l’appareil et c’est ainsi qu’après une année de démarches a été crée l’hydrobase ULM de Villefranche et le club “Air des Lacs” avec le concours de toutes les autorités compétentes (DAC Sud, PAF, Préfecture) sans oublier EDF qui est gestionnaire du plan d’eau.

 

Entre-temps je me suis lancé dans la transformation de mon Weedhopper en le chaussant d’une paire de flotteurs Feuillette achetés d’occasion. Joe Astruc et Jean-Marc Galtier, aveyronnais originaires des environs, très attachés comme moi à ce coin de Levezou et tous deux instructeurs ULM, sont associés dès le départ à ce rêve qui se concrétise. Formation spécifique des pilotes et mises au point de la machine terminées, nous débutons les vols, notamment par des baptêmes proposés aux vacanciers pour leur faire découvrir notre belle région vue du ciel. Il faut dire que décoller sur l’eau, prendre de la hauteur, admirer le viaduc de Millau, la vallée du Tarn, le

lac de Pareloup et se reposer en douceur sur notre petit lac est une expérience inoubliable dont on ne se lasse pas. Comme pour toute activité nouvelle nous essuierons quelques plâtres liés à notre manque d’expérience qui nous permettront d’en retirer les enseignements nécessaires.

 

ULMiste : on va pas les ressuyer, ces plâtres, passons donc sur les détails…

 

Paul Dellac : en mai 2009, nous organisons un rassemblement. Malheureusement pas de vol sur l’eau ce week-end-là car le lac est trop agité. Par contre une cinquantaine de machines se poseront sur la piste terrestre occasionnelle tout près du lac. Ce sera pour nous l’occasion d’inaugurer l’hydrobase. Aux côtés des officiels du canton, Dominique Méreuze est présent pour couper le cordon. Il a fait le déplacement en voiture pour venir nous assurer du soutien de la FFPLUM. La saison estivale de baptêmes passée nous décidons d’élargir notre rayon d’action. Je commande une paire de flotteurs amphibies chez Puddle Jumper au Canada. Le montage s’effectue sans problème et ces flotteurs nous donnent entièrement satisfaction. Nous les testerons réellement au meeting 2010 de Biscarrosse. Entre temps j’ai fait une demande pour créer une nouvelle hydrosurface sur le lac de Pareloup qui est tout près. Nous pouvons ainsi sortir de notre cône local  du lac de Villefranche. Au mois d’août 2010 nous organisons notre rassemblement annuel. Quatre machines hydro seront présentes cette fois-ci, et pour fêter le centième anniversaire de l’hydravion, Guillaume Bulin et son équipe exposeront la réplique du canard d’Henri Fabre, reconstruit à l’identique.

 

ULMiste : ça doit commencer à peser, ces flotteurs, le 582 suffit ?

 

Paul Dellac : non, le 582 était un peu limite, la traînée et le poids des flotteurs, l’altitude du lac, la température sont autant de facteurs qui nous obligent à limiter le poids des passagers. Le montage d’un 4 temps ne nous paraissant pas approprié pour des raisons de coût, de poids, de difficulté de montage, nous avons donc osé le Simonini Victor2, deux temps de 92 cv et pour l’instant nous ne le regrettons pas. Ni plus lourd ni plus bruyant que le 582, ce moteur fournit une puissance supplémentaire qui nous permet de grimper plus rapidement pour nous mettre très vite en sécurité. Au passage j’aimerais souligner la compétence d’ULM Technologie qui distribue ce propulseur.

 

ULMiste : et le rallye Aveyrolacs, que nous avions annoncé dans ces colonnes ?

 

Paul Dellac : à l’automne 2010 je prends mon bâton de pèlerin et visite quelques 25 lacs potentiellement utilisables dans notre région Sud-Ouest. J’en sélectionne une vingtaine et fais les demandes adéquates en vue de réaliser un rallye hydro doublé si possible d’un rallye terrestre. J’obtiens quelques autorisations, de quoi faire un parcours de 500 km sur une dizaine de lacs. Mais je me rends vite compte que le projet est trop ambitieux, la logistique est importante et notre club n’est pas structuré pour assurer une telle organisation. Nous devrons donc nous contenter d’un parcours réduit à quatre lacs sur les deux départements du Tarn et de l’Aveyron. En fin de compte notre rallye “Aveyrolacs” se transformera en un rassemblement et notre circuit se limitera aux deux lacs de Villefranche et Pareloup. Nous rassemblerons tout de même 4 machines hydro, une vingtaine d’ULM terrestres, 3 paramoteurs, un hélicoptère et 6 aéroglisseurs. Une fois de plus Dominique Méreuze nous fera l’honneur de sa visite, ce qui a été très apprécié de tous. Jean-François Monnier de l’association “France Hydravions” qui s’attache activement à la relance de l’hydraviation, avait également fait le déplacement depuis la Vendée avec son Sea-Max. Sur terre, outre les participants régionaux nous avons pu apprécier la présence d’Alain Feuillette et son équipe venus de Beaulieu sur Loire et du club de de Salon Ayguières venus en nombre. 

 

ULMiste : quels sont les projets ?

 

Paul Dellac : pour 2012, participation au rassemblement de Biscarrosse, un projet à l’étude avec l’école de Villefranche, organisation de stages initiation hydro (avec hébergement), mise en place d’une deuxième machine pour assurer les baptêmes cet été, rotations entre les lacs de Villefranche et Pareloup… ça ne manque pas. Mais aussi, démarrage de la construction de la réplique du Morane Saulnier type G de 1912, avion mythique de Rolland Garros, en partenariat avec l’association Réplic’Air présidée par Jérémy Caussade, notre secrétaire. Cette réplique effectuera ses premiers vols en version terrestre puis en version hydro. Notre club est chargé de la fabrication des flotteurs et de la mise à l’eau sur le lac de Villefranche. Enfin,  le Rallye Aveyrolacs  31 août, 1er et 2 septembre avec report éventuel les 14, 15 et 16 septembre. A savoir que les 8 et 9 septembre un rassemblement hydro sera organisé aux Mureaux (région parisienne) par l’association France Hydravion.

 

ULMiste : penses-tu qu’il y a un avenir pour la pratique de l’hydro en France ?

 

Paul Dellac : je pense que l’activité hydro peut renaître  mais pour inciter des pilotes à rendre leur machine aquatique il faut avoir des plans d’eaux où la poser. Il faut donc que d’autres hydrobases ou hydrosurfaces soient créées. Les démarches ne sont pas compliquées, pas plus que pour ouvrir une piste terrestre. Si tous les ULMistes qui ont un plan d’eau à proximité de chez eux veulent bien s’y aventurer, on peut espérer un renouveau mais cela prendra du temps. Je précise que l’association France Hydravion s’attache à cette relance.

 

ULMiste : pourtant, ailleurs, l’hydro est plus développé ?

 

Paul Dellac : oui et j’ai pu en prendre la mesure. En 2009, avec Jean-Marc Galtier, membre du club, nous sommes allés à Côme en Italie. Ca fait plaisir de voir autant de machines hydro dans un hangar en pleine ville. On ne les a pas vus voler car ce jour-là il y avait une course d’Off-Shore sur le lac et les vols étaient interdits. Puis cette année au mois de septembre avec Jean-Marc et Jean-Pierre, autre membre du club et nos épouses, nous avons prétexté un voyage de tourisme au Canada pour répondre à l’invitation de   Patrick Vinet, fabriquant de flotteurs Puddle Jumper à  Montréal. La réputation de l’accueil canadien a vraiment pris tout son sens car il nous a invités tout un week-end au Mont-Tremblant, station de ski où il a sa maison secondaire et son ULM Amphibie (un Challenger). Il n’a pas pu nous faire voler car le vent soufflait très fort ce week-end-là.

Mais nous avons tout de même pu voler en hydravion sur le lac à Beauce à bord d’un Cessna et nous rendre ensuite au Lac-à-la-Tortue où se trouve la plus grande hydrobase du Québec. Nous y avons dénombré plus de trente hydravions sur le parking et une quantité impressionnante de flotteurs en attente de montage. C’est un autre monde, le nombre de lacs est vraiment impressionnant vu d’avion et on peut se poser partout sans rien demander. Ca fait rêver ! De passage à Ottawa, une visite du musée de l’aviation s’imposait. On y trouve toute une collection d’hydravions extraordinaire.

 

ULMiste : pourrais-tu nous parler de ton grand-père ?

 

Paul Dellac : avec plaisir ! Désiré Crayssac, mon grand-père maternel, était un inventeur du début du siècle dernier. De 1909 à 1935 il a déposé de nombreux brevets relatifs à l’aviation, notamment le fameux moteur “Cyclone” en 1912. Ce moteur rotatif sans soupapes était tout à la fois simple à réaliser, léger, robuste et économique. Il fut construit, essayé sur un avion Borel et produit en série. Il ne me reste malheureusement que des documents et revues techniques de l’époque. Je n’ai pas réussi à retrouver un seul exemplaire de ce moteur. En 1913 Désiré Crayssac déposa un brevet intitulé “Cerf-volant automoteur” dont le principe était exactement celui de l’ULM pendulaire. D’autres de ses brevets furent achetés par les maisons Gnome et Rhône et Junker. En 1930 Désiré Crayssac construisit une usine hydro-électrique et éclaira le Village de Villefranche 11 ans avant l’arrivée d’EDF !

 

ULMiste : toujours sans transition, les jeunes dans l’ULM ?

 

Paul Dellac : faute de disponibilité j’ai un peu laissé tomber l’instruction avec toutes les contraintes qu’elle comporte mais il me semble que la fréquentation des jeunes dans les clubs et les écoles a baissé malgré les aides qui leur sont proposées et les actions menées par la fédé. A mon avis ceci est du à plusieurs facteurs :

- Le coût du brevet trop élevé. Les machines utilisées en

école sont de plus en plus performantes et demandent une plus longue formation.

- Peu d’écoles ou de clubs proposent la location d’une

machine.

-Difficulté pour trouver une place dans un hangar pour loger un appareil.

 

ULMiste : tout le monde peut être d’accord avec ces constats, mais quelles seraient les solutions ?

 

Paul Dellac : peut-être faudrait-il revenir à des machines plus simples, moins chères et faciles à piloter, ce qui est me semble-t-il la philosophie de l’ULM dont on s’est bien éloigné.

- Proposer aux jeunes l’achat d’une machine  en copropriété ou en mettre une en location dans le club.

- Inciter les propriétaires de machines qui ne volent pas ou peu à céder leur place de hangar.

- Enfin, je pense que la nouvelle mesure de la fédé (parrainage) est une bonne idée qui va le bon sens.

 

Les Citoyens du Ciel

 

“Née en  2006 dans la région toulousaine, l’association « les Citoyens du Ciel » se propose d’organiser des rallyes aériens au bénéfice des enfants en difficulté (handicap physique ou social…). Le 1er tour aérien solidaire, appelé « Ailes du partage », déploie ses ailes au-dessus du Maroc en 2006. Suivront ensuite les Ailes du Partage dans le Sud-Ouest de la France en 2007, en Espagne en 2008 et 2009, en Allemagne, Autriche et République Tchèque en 2010, et en Espagne à nouveau en 2011 pour célébrer le centenaire de la première course aérienne Issy-les-Moulineaux / Getafe. Les Citoyens du Ciel ont ainsi fait voler des centaines d’enfants (+ de 700 à ce jour) dans plus de 6 pays dont la France. L’association compte aujourd’hui 40 membres et fonctionne avec un budget entièrement autofinancé par les ventes, lotos, galas et dons récoltés tout au long de l’année.

En 2012, les Citoyens du Ciel lancent un nouveau défi : le « Trophée des Citoyens du Ciel ». Nous avons décidé de créer un trophée qui fait appel à divers ressorts : réaliser un rêve, relever un défi, se découvrir des compétences, s’ouvrir à d’autres différences, s’inspirer de pionniers et de leurs valeurs pour croire en son futur… Parce que notre expérience nous a convaincu des retours positifs de telles actions, où la mixité des difficultés individuelles, au sein d’une équipe, réussit à transformer un handicap en  une force inimaginable. Le trophée mobilisera pendant 6 mois des équipes de jeunes en difficulté scolaire ou physique (mal voyant, mal entendant) avec des jeunes passionnés ou en formation aéronautique, encadrés par des adultes qui veulent “transmettre”. C’est une valeur ajoutée à long terme que nous souhaitons apporter aux jeunes qui participeront à l’aventure. Cette coupe sera remise en jeu chaque année et les participants précédents pourront devenir des ambassadeurs, garder le contact avec les Parrains, identifier, utiliser les compétences qu’ils ont acquises et les goûts qu’ils ont développés pour les mettre au service d’autres jeunes.”

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