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23 juin 2014

 

On observe cette année un nombre important d’accidents d’ULM. C’est-à-dire, comme d’habitude. Et alors, comme d’habitude, on y va des commentaires plus ou moins éclairés « pourtant, c’était le meilleur d’entre nous, il avait une grande expérience, tout ça »…

Bah oui, comme d’habitude, que les ceux qui nous représentent considèrent que mourir en ULM est une habitude, une fatalité… et va même jusqu’à estimer que quand il y a moins de 25 morts, c’est une « bonne année ». Biyanvrac a dans l’idée que la seule vraie bonne année ce sera quand il y a aura 0 mort.

 

Mais bon, le Gédéon voudrait donc nous entretenir ici de ce qu’est l’expérience. Apparemment, pour certains beaucoup, elle ne se mesure qu’au nombre d’heures de vol.

« L’expérience est comme une lanterne accrochée dans le dos, elle n’éclaire que le chemin parcouru ». Dit Confucius. Le Gédéon a déjà expliqué combien il trouve qu’il est con, ce Fucius. En effet, outre que le postulat lui semble discutable, il a dans l’idée, Biyanvrac, qu’éclairer le chemin parcouru permet au moins aux ceux qui suivent d’y voir clair, pour peu qu’ils s’approchent suffisamment de la susdite lumière.

 

Or donc, en aviation, on considère que l’expérience se mesure en heures de vol. Prenons, par exemple, un pilote de ligne. En fin de carrière, son « expérience » peut se compter en dizaines de milliers d’heurs de vol. Pendant ce temps, l’ULMeux moyen aura cumulé un millier, s’il vole régulièrement. On peut donc poser que le lignard a une bien plus grande expérience que l’ULMeux. Et que donc, dans une situation difficile, il s’en sortira mieux, ou du moins on attendra de lui qu’il.

 

Et c’est ce qu’on lit, encore ces jours-ci et comme d’habitude, à propos d’un Batave conducteur d’avion léger type ULM qui s’est vautré voici quelques jours et s’occis, ainsi que sa tendre. « Il avait pourtant beaucoup d’expérience ».

 

Et alors bon, outre que l’expérience ne protège pas en soi, il convient peut-être de voir un peu de près de quoi on cause… pilote de ligne, c’est le gars qui conduit l’avion sur le tarmac, le décolle, appuie sur des boutons pendant quelques heures en causant dans le poste, puis reprend les commandes pour poser le truc. Au total, sur un transatlantique qui alimente son carnet de vol de 8 heures, il aura piloté parfois moins d’une heure. En termes de pilotage, il n’a donc pas accumulé 8 heures, mais 0,75… sur le type d’avion concerné, bien sûr, ce qui ne lui sera d’aucune utilité sur un avion léger.

Un commandant de paquebot sera-t-il forcément bon en jet-ski ? Un routier doué sur un kart ? Certainement pas !

 

Aussi, plutôt de s’offusquer que le gars puisse se planter alors qu’il a des dizaines de milliers d’heures, sans doute faut-il plutôt essayer de savoir combien d’heures il compte sur le type de machine concernée par le gag. En l’occurrence, on n’en sait rien. 100, 200, 500 ? En tous cas certainement beaucoup moins que dans son autobus à ailes, à moins qu’il n’ubiquite.

 

Ensuite, ces heures de vol, en quoi consistent-elles, faut-il se demander ? Si elles se résument à des vols de balades en ligne droite au GPS, d’un aéroport à l’autre (ce qui est probable, vu que dans son pays on ne peut guère voler autrement), cette expérience-là, quel que soit le nombre d’heures, ne pèse guère face à la gestion d’un incident tel qu’une panne moteur au décollage, puisque c’est de ça qu’on cause.

 

En revanche, le celui qui ne cherche pas à accumuler les heures de vol pour les heures de vol mais travaille, à chacun de ses vols, ses acquis, en tentant de les faire croître, lui, tu peux monter dans son avion, il te plantera moins souvent suite à une pannouille au décollage. Le Gédéon t’en met son billet !

 

« Mieux vaut une tête bien faite que bien pleine », dit Montaigne, qui ne savait pas qu’on peut voler. Le seul souci, c’est que pour connaître Eyquem, il faut aussi une tête un peu pleine…

 

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