29 avril 2008
« L’ULM, ça tue les cons ». C’est pas Gédéon qui dit ça, c’est Danis. Que le Gédéon, il a même pas tellement envie d’être d’accord, que sinon ça voudrait dire que son tour va pas tarder.
Oui mais bon, c’est qui ce Danis ? qu’il t’entend dire, le Gédéon, à toi qui découvres. Danis, c’est le premier type qui a importé un delta en France, et qu’à la suite de ça le truc a pris, puis est devenu l’ULM. Parce qu’au départ, l’ULM, c’est le pendulaire, pour ceux qui suivent pas. Le trois-axes il est venu après, le trois-axes, sous l’impulsion de types de l’avion. Et alors, ce Danis, il est ensuite devenu constructeur d’ULM à son tour, que ça s’appelait, sa boîte, « La manufacture de cerfs-volants », ce qui est joli tout plein et bien moins prétentieux que les trucs de maintenant. Ses ateliers étaient situés à Maisons-Alfort, juste à côté du siège actuel de la fédéplume, que ça, les ceux de la fédéplume, ils le savent même pas. Sinon, pour te rassurer, qu’il voit bien, le Gédéon, que tu te demandes, Danis est mort dans son lit, comme beaucoup.
Et alors bon, il avait donc des théories scientifiques sur le lien entre ULM et sélection naturelle, ce Danis (Bernard). En entendant ses propos, tout le monde opine, en se disant que « bah oui, qu’est-ce qu’il a raison », que les cons c’est toujours les autres. Le Gédéon, lui, trouve que le con qui est ainsi en danger de mort, c’est le celui qui n’a toujours pas compris ce que c’est, que l’ULM. Le celui qui oublie ou feint de faire genre il a pas vu, que ce truc-là, c’est certifié par personne d’autre que toi, qui mets ton cul dedans, et que du coup quoi qu’il arrive ce sera à toi d’assumer. Beaucoup des « nouveaux » qui viennent à l’ULM l’oublient, ça, qu’il dit, le Gédéon.
C’est pas toujours de leur faute, note bien. Bien souvent, ils sont formatés par une société téhèfinisée, qui croit qu’en bon consommateurs qu’ils sont tout est fait pour leur assurer le risque zéro. Que le principe de précaution s’applique partout, sauf sur eux-mêmes. Et alors bon, les plus atteints, de cette race-là, sont les ceux qui viennent de l’avion. Sans généralité, non, que le Gédéon n’aime pas ça, mais les ceux dont il a causé il y a quelques jours, et qui sont déformés par un système aéronautique qui les tient en tutelle depuis des lustres. Peut-être que personne ne leur a dit ce qu’est l’ULM, note bien, ou alors pas assez fort, que s’ils savaient vraiment, ils n’y toucheraient pas, à l’ULM, c’est sûr, et que ça serait pas plus mal ! Dans l’avion certifié, tout est fait pour que ce soit de la faute d’un autre. Dans l’ULM, la seule règle c’est que quoi qu’il arrive il te faudra l’assumer, toi qui pilotes.
Par exemple, en cas d’accident, par exemple. Le Gédéon a lu il y a trois jours qu’un ULM d’aéroclub (déjà rien que ça, il en attrape des boutons), s’est vautré dans un village. Le pilote promenait un photographe qui voulait immortaliser une compétition de pétanque. Bon, déjà, rien que ça. Si tu sais ce qu’est la pétanque, tu te demandes déjà comment tu peux prendre des photos d’un cochonnet depuis un avion, mais bon, voilà, les types, là, ils y croyaient. Cette compète n’est pas en pleins champs, tu te doutes, que la pompe à pastis, elle est dans le village. Dans le village, donc, la pétanque. Que ce village, tu peux pas le survoler à moins de 500 voire 1000 mètres, que ça dépend de la taille du bled, qu’en l’occurrence le Gédéon n’en sait rien. Bon, déjà, pour les photos du cochonnet, t’as compris…
Et alors bon, le type, il descend un peu beaucoup en dessous des minima, se prend une panne moteur, et finit aplati dans la cour d’une usine. Ni lui ni son passager n’ont mal, que le Gédéon est bien content, c’est le plus important. Buvons un coup.
Jusque-là, le Gédéon, il se tait, que ce genre de truc peut arriver à tout le monde, et que les ceux auxquels c’est pas arrivé c’est qu’ils ont eu du bol de pas tomber en panne au moment où il fallait pas. Le problème n’est pas de savoir s’il a fauté ou pas, le gars, que tout le monde le fait, donc. La question, c’est après qu’elle vient, la question. Regarde.
Le pilote est un ancien captain d’Air France, donc on peut pas dire que c’est un dangereux ulmiste nihiliste et ignorant des lois. C’est un ULM d’aéroclub, en location, façon avion certifié, que ça, s’ils savaient vraiment ce qu’est l’ULM, les types ne joueraient pas à ça. Passons, ça encore, c’est pas trop grave, même si le Gédéon persiste à penser que ça devrait pas exister. D’après les journaux, voici ce que dit le pilote : « j’ai subi une rafale descendante, j’ai voulu remettre les gaz, l’avion n’a pas répondu ». Avant de poursuivre, le Gédéon voudrait poser un préambule, que sinon il va encore avoir des emmerdes de gars qui lui envoient des messages. Considérons, si tu veux bien, qu’à partir de maintenant c’est une fiction, et que le journal rapporte mal ses propos. Voilà, ça c’est fait, on peut reprendre, et merci.
Le type, si c’est un vrai pilote d’ULM qui assure et assume, il dit « ok, j’ai merdé, j’étais très en dessous des minimales réglementaires, et lorsque la panne est arrivée, je n’ai pas pu gérer mieux que ce que j’ai fait ». Parce qu’il faut tout de même reconnaître que pour arriver à poser le truc dans une cour, il faut pas être trop tordu du manche, même s’il casse l’avion. Si, quand même, on peut lui reconnaître ça, au gars. Niveau pilotage, bravo !
Le type qui a compris ce qu’est l’ULM, et qui ne cherche surtout pas à se décharger sur autre chose que sa propre erreur, il n’invoque pas la panne moteur comme facteur causal parce qu’il sait qu’elle peut arriver n’importe quand, et surtout, il n’invoque pas une histoire de rabattant, que le jour où tu verras des rabattants qui te descendent, tout d’un coup, de 500 mètres en plaine, tu pourras pas le raconter, tu seras mort avant…
L’ULM, ça tue ceux qui ne l’aiment pas, et le trahissent en le prenant pour un avion, que dit le Gédéon, si on lui permet de compléter l’avis de l’éminent spécialiste.
Enfin, bon, c’est juste pour dire ce qu’il pense, hein, vu qu’il est là pour ça…