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Airborne Outback XT HKS Merlin

Article paru dans ULMiste n°15, mai 2013

 

Outback XT HKS Merlin

 

Pour le numéro 2 de votre magazine, nous vous avions proposé l’essai du Outback XT avec l’aile Cruze de ce constructeur australien, Airborne. Nous en avions dit que s’il constitue un ensemble intéressant, l’assemblage proposé manquait de cohérence : une aile plutôt rapide dans sa gamme, un chariot destiné au tout-terrain et un moteur pas assez puissant pour des décollages courts. Trois ans plus tard (merci à vous !), nous voici à nouveau à Meaux pour tester en vol ce même chariot et moteur, cette fois-ci surmontés de l’aile Merlin, simple surface de 14,5 m2, ce qui est très inhabituel et même inédit.

 

Pierre-Jean le Camus

 

Airborne

 

Installée depuis les années 70 dans les Nouvelles Galles du Sud (État dont la capitale est Sydney), Airborne officie au départ dans le delta. Ce sont les fils Duncan qui opèrent, la gestion étant maintenant confiée à Rob Hibberd, compagnon de la première heure. Initialement impliqués dans le delta, ils commencèrent à fabriquer des ULM pendulaires au tout début des années 80, après avoir importé une machine Britannique, d’où le lien de parenté évident. La gamme comprend dix chariots, motorisés par toute la gamme Rotax et une large gamme d’ailes, en libre comme en motorisé. C’est aujourd’hui le Outback Merlin HKS que nous testons. Tout comme la machine essayée il y a trois ans, cet assemblage n’est pas au catalogue officiel. C’est l’importateur France qui a adapté cette configuration mais HKS ne proposant plus ce moteur, il n’est plus possible de demander la même chose, l’ensemble est proposé en série par le constructeur avec un Rotax 582 ou 912 ! Mais c’est l’aile que nous sommes venus tâter aujourd’hui.

 

Outback

 

L’outback, « arrière-pays Â», désigne en Australie ce que l’on nommerait le désert. Ce sont les régions inhabitées et inhospitalières qui couvrent l’écrasante majorité de ce pays continent, le plus sec au monde. Le nom évocateur de ce tricycle indique donc qu’il se destine à fréquenter des terrains reculés. Il est ainsi équipé de grosses roues toundra du plus bel effet visuel mais d’un moins bel effet aérodynamique, quoiqu’à la vitesse d’évolution de la Merlin ce ne soit pas un gros souci ! Le moteur est très correctement monté par Jean-Jacques Chillaud. Pour le moment, ce montage reste unique. Depuis notre dernière évaluation, rien n’a changé, à part la couleur de la console champignon et de l’hélice, qui deviennent grises, sans doute en harmonie avec l’aile. On peut relire la présentation complète du chariot dans notre numéro 2, bientôt disponible en ligne en plus du papier, comme tout ULMiste d’ailleurs.

 

Merlin

 

C’est essentiellement l’aile qui nous intéresse aujourd’hui ! En effet, 14,5 m2 en simple surface, destinés à faire voler 450 kg, c’est, à notre connaissance, unique sous nos latitudes. Les moindres performances de l’aile par rapport à la Cruze, donc ses moindres besoins en énergie, ainsi que sa vitesse basse plus modeste, tendent à laisser penser que cet ensemble, avec le HKS et les grosses roues, sera plus cohérent ou plus en phase avec le moteur, et apte toute forme de vol (du vol local, de petites balades régionales) et du tout-terrain pas trop engagé. Les machines dites « performantes Â» actuelles, sont parfois moins aptes à « toute forme de vol Â», puisque, pour certaines, exclusivement dédiées à la ligne droite à Mach2…

Comme sur toute la production Airborne, la construction est irréprochable et les finitions très soignées. Le travail de voilerie est exemplaire, tout respire la santé et le bien étudié. Nous trouvons onze lattes par côté, uniquement à l’extrados bien sûr, ce qui reste important pour une simple surface (et équivalent à ce que l’on trouve en double surface). Il n’y a pas de cale de vrillage, malgré que les cordes de rappel ne partent pas très loin vers les extrémités. Les extrémités des lattes sont « modernes Â», c’est-à-dire dépourvues de ficelles avec réglage de tension par vissage-dévissage. Cette architecture particulière donne à cette aile un aspect contemporain, qui évoquerait presque une aile dans mât, tant elle est tendue et peu vrillée, donc visuellement « plate Â» au sol. Aux faibles vitesses auxquelles elle se destine, il sera intéressant de voir ce que ça donne en stabilité sur les trois axes.

 

Ça brasse !

 

Justement, allons voler. Il ne s’agira que d’une rapide prise en mains d’une grosse heure, le chariot ayant déjà été testé, y compris en tout terrain. En 2010, nous avons pesé cet ensemble à 209,10 kg sans essence, avec parachute. La Merlin pèse deux kilos (seulement) de moins que la Cruze, nous sommes donc à 207,10 kg. Pilote et passager totalisent 175 kilos habillés et casqués et nous décollons avec 30 litres de carburant. Nous sommes donc à 403,10 kg au décollage, pour une masse maximale établie à 450 kg. Avec le plein (70 litres), nous serions à 431,10 kg, soit une marge de 18,9 kg pour les bagages. Nous sommes sur un vrai biplace, comme le sont la plupart des pendulaires. C’est aujourd’hui Pierre-Joseph Delvaux, ami, pilote pendulaire et chuteur déjà présenté en nos lignes, qui est notre passager du jour. Il n’a pas volé en pendulaire depuis près de deux ans, suite à un accident sur lequel nous reviendrons, car il est riche d’enseignements. A la visite prévol, je note que l’aile est centrée arrière et comme d’habitude, nous considérons que l’importateur nous propose la machine dans la configuration qui lui semble la plus intéressante. L’installation à bord ne pose pas de problème et PJ (l’autre), trouve la place de loger ses longues jambes.

En ce mardi 25 juin à 15 heures, la température est assez élevée (enfin !) et le vent souffle nord nord-ouest pour environ 15 à 20 km/h. L’occasion de tester l’aile en conditions turbulentes, d’autant que Serge Bouchet, de retour d’un baptême, nous indique que ça brasse pas mal. Le moteur démarre comme il se doit, avec un peu de starter. Nous attendons qu’il prenne ses températures, je cafouille à la radio puis nous nous alignons. Les 55 cv (pendant trois minutes, 50 cv en continu), du HKS ébrouent tranquillement la machine, qui décolle en environ 8 secondes. Je m’abstiens de la prise de vitesse pour monter tout de suite et passer au-dessus de la turbulence d’un hélico qui vient de mener une autorotation, le contrôleur ne m’ayant pas proposé d’espacement. En effet, ça brasse, mais je maintiens la machine. Cap sur Coulommiers, mon petit terrain « fétiche Â», (après avoir constaté de petits soucis de radio). Nous folâtrons ici et là, histoire de sentir la machine. Disons les choses telles qu’elles sont : cette aile n’est pas la championne en turbulences au centrage arrière en tous cas. A la vitesse de compensation, que nous relèverons tout à l’heure à 75 km/h, j’observe un flou sur une latitude d’environ 25 cm, en tangage comme en roulis : très faible rappel au neutre et aucune précision, en plus de comportements erratiques sur l’axe de lacet. Il faut mettre de grands coups aux commandes pour obtenir une réponse, avec le risque, alors, de surpiloter. Serge m’expliquera qu’avec un peu d’accoutumance cette sensation disparait complètement et que, selon lui, il faut apprivoiser cette aile de façon à la piloter correctement et tout se passe très bien. En effet, l’aile est très maniable, au prix, nous l’avons vu, d’un faible rappel au neutre. En tirant sur la barre, la précision augmente, de telle sorte qu’il faudrait, à ce centrage, maintenir une action à tirer (sans gros effort), pour conserver de la défense. Nous mènerons de plus amples mesures en air plus calme, en attendant nous faisons une longue pause à Coulommiers. Je me présente sur la piste ULM, vent plein travers. En très courte finale, je décide d’une remise da gaz, ne sentant pas le toucher des roues en travers avec le peu de précision de l’aile et, surtout, le fait que je ne l’ai pas bien en mains. Je prolonge la vent-arrière et viens chercher la piste avion en herbe, que je prends en diagonale. Posé sans souci à faible vitesse, je me dirige vers le parking ULM (de l’école de Philippe Nellemann). Je présente ici mes excuses à l’autogire ELA jaune que j’ai fait patienter au sol, mais mes petits soucis de radio m’ont empêché d’annoncer mes intentions… (c’était juste les Jack mal enfoncés, ce sont des choses qui arrivent…)

 

Il est 17 heures, le vent se calme, il est temps de retourner à nos mesures. Décollage vent de travers sans souci, les turbulences se sont bien calmées. Parvenus à une hauteur suffisante, nous testons le décrochage. Ce dernier survient à une dizaine de centimètres du tube avant, moyennant des efforts notables et se produit sans réelle abattée : très sain. La vitesse est d’environ 55 km/h. La récupération s’obtient classiquement, en ramenant les commandes au neutre. La stabilité en virage se montre plutôt neutre des deux côtés jusqu’à 30° d’inclinaison, hors effets moteur. Au-delà, c’est instable, normal. Le décrochage en virage ne montre rien de malsain non plus. La vitesse de compensation, centré arrière, s’observe à 75 km/h et, barre en butée contre le gras de l’hiver et gaz à fond, on obtient 95 km/h. Au bout de quelques secondes, une légère oscillation en lacet apparaît, signe que le vrillage en bout d’ailes n’est pas suffisamment maintenu pour une action à tirer permanente, comme nombre d’ailes. En rentrant le ventre, ça descend. Le taux de montée gaz à fond avec une légère action à pousser montre un petit 2 m/s, tandis que le taux de chute affiche 3,2 m/s. A comparer aux performances annoncées par le constructeur, avec un Rotax 582 : 93 km/h en compensation, 62 au décrochage, 3,2 m/s en montée et la même observation que nous en descente (logique). Outre que le 582 offre 15 cv de plus, le centrage n’est certainement pas arrière pour les mesures constructeur, vu ce qui est annoncé en compensation.

 

En conditions plus calmes, nous trouvons une machine bien plus agréable, malgré le manque d’habitude de cette aile. Le faible rappel est sans aucun doute du à la position du centrage et nous invitons nos lecteurs qui iraient faire un essai à demander à le faire varier. Nous ne l’avons pas fait, n’étant pas outillés lors de notre vol. Nous aurions pu faire cela une fois revenus à Meaux, mais les exigences du temps et l’agenda de tous nous en ont empêchés. Peut-être l’occasion de chiner encore un petit tour sur le Merlin !

 

Pour qui ?

 

Cette machine, dont le chariot était utilisé auparavant en école, a été achetée par trois pilotes débutants, en copropriété. Pour cet usage sortie d’école et accumulation d’heures, il constitue un ensemble très cohérent. Facile à prendre en mains, confortable en solo et suffisamment en bi, et surtout, d’une faible consommation : lors de nos vols, nous avons observé 10 l/h en biplace, plutôt chargés ! Sans doute faudra-t-il se contenter, au début, de vols en conditions pas trop turbulentes, ce qui est, de toutes façons, le propre de tout pilote pendulaire qui veut simplement se faire plaisir. Bien entendu, cet appareil n’est pas le plus apte à la navigation au long cours, mais pourra tout de même mener son jockey fort loin, car, en la matière, la monture n’est rien, les pilotes pendulaire le prouvent tous les jours !

Reste son gros défaut, que Serge Bouchet admet sans détour que « la qualité à un prix Â». Le cours des échanges dollar australien / euro et les frais de transport et douane étant ce qu’ils sont, cet ensemble est facturé, en neuf, 44 355 €TTC. 7 883 €TTC si on veut l’aile seule. Quand on a le privilège de vivre sur le continent qui héberge les meilleurs constructeurs mondiaux, difficile de faire face, même si Airborne reste un acteur majeur du pendulaire.

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