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Claude Cordelle

Article paru dans ULMiste n°22, janvier 2016

 

Claude Cordelle

 

ULMiste : question bateau habituelle, qu'est-ce qui t'a amené à l'ULM ?

 

Claude Cordelle : d'en voir un passer pendant que j'étais en vacances à Bandol, en 1994. Un pendulaire hydro faisait des baptêmes. J'avais du temps, j'y suis allé et Fred m'a baptisé en pendulaire. C'était un Goéland à moteur Arrow et une aile de 25 m² qui volait à 60 ou 65 à l'heure. J'étais en vacances, j'ai donc commencé les cours tout de suite. Bien sûr, le temps a manqué, aussi, en revenant chez moi, j'ai cherché un club dans le quartier et j'ai trouvé, à Epernay. J'y ai poursuivi ma formation pendulaire, avec un Cosmos sur roues. L'instructeur, décédé depuis, se nommait Aimé Galant. Il devait peser dans les 100 kg, le lâché fut donc mémorable, les pieds au ciel !

J'ai eu mon brevet, puis c'est parti. Je suis resté un penduleux exclusif pendant très longtemps, jusqu'en 2006. J'ai fait beaucoup de raids avec Air Flash d'Amiens : Irlande, Maroc, Italie, etc. En 2007 j'ai goûté au multiaxes.

 

As-tu acheté une machine aussitôt après le brevet ?

 

Oui, un Jupiter, à l'époque. 503 Fun 18.

 

Ah oui, effectivement, le pendulaire fabriqué par Gérard Cange !

 

C'est ça ! J'ai eu ça jusqu'en 2003, où je suis passé chez DTA, avec un Feeling.

 

Tu l'as gardé longtemps ton Jupiter ! En 2003, c'était déjà une pièce de musée !

 

Ah oui. J'ai fait le Tour de France ULM avec, à deux dessus. J'étais le moins rapide !

 

Du coup c'est toi qui as volé le plus !

 

Tout à fait !

 

Tu as fait d'autres raids avec cette machine ?

 

Non, uniquement le Tour de France. J'ai commencé les raids avec le Feeling, en 582 avec une 15. En 2007 je suis passé sur un Combo FC tout caréné 912 S Dynamic 450. C'est un peu surmotorisé. J’ai fait un beau raid avec ce Combo, un retour du cercle polaire. On avait amené les machines par la route à Kiruna, au nord du cercle polaire en Suède. On est donc descendus en passant par le Danemark, la Hollande, la Belgique, puis Amiens. On en a un peu bavé, ces régions sont humides, froides et en Suède, il n'y a pas vraiment de quoi se vacher. Mais je me suis vaché en Allemagne ! La sortie d'échappement s'est dessoudée, est passée dans l'hélice et a traversé l'aile. Je me suis posé dans une pâture, on a réparé avec les moyens du bord. En Hollande, on est tombé sur un gars qui a su me faire une belle soudure qui tient toujours !

Je suis allé aussi en Irlande avec le Combo. On avait amené les machines à Glasgow, de là on a traversé, fait le tour de l'Irlande, puis redescente de toute l'Angleterre, traversée de la Manche et maison.

C'est à cette occasion que j'ai découvert l'autogire ! Air Flash venait de s'y mettre, il y en avait deux sur le raid, j'ai essayé.

 

En quelle année ?

 

En 2009

 

Donc, après le multiaxes ?

 

Oui, le multiaxes, c'était en 2007. Un copain penduleux m'a indiqué qu'il connaissait un Zénair 601 UL à vendre, on l'a acheté à deux pour apprendre et voir ce que c’était. Je n'étais qu'à moitié enthousiaste, pas trop branché trois-axes, mais j'ai évolué en apprenant. Après un an en copropriété, j’ai préféré avoir une machine à moi et j’ai changé pour un 601XL. Je l'ai toujours. Mais en trois-axes, je ne vole que 30 à 40 heures par an.

 

Pas mal ! Bien des gens ne volent qu'en trois-axes et ne les font pas ! Et en trois-axes, tu as fait aussi des raids ?

 

Non, j'ai fait des vols très sympas, entre copains, pour aller dans le sud, dans l’ouest, à Friedrichhaffen... Plutôt des déplacements que des voyages. Les raids, c'est pendulaire ou autogire. Mais une fois que je suis passé à l'autogire, j’y suis resté. J'ai commencé avec un Magni M16, jusqu'à 200 heures par an, puis un Calidus, autant d'heures.

 

Pourquoi pas de raids en trois-axes ?

 

A mon avis, ce n'est pas approprié aux raids. C'est moins fun, moins amusant, que le pendulaire ou l'autogire. Le trois-axes, pfff, c'est un petit avion, quoi. Les sensations sont atténuées, on a tendance à voler plus haut, plus vite, c'est moins jouissif que le reste ! Avec le Magni, je suis allé en Italie, en Croatie… je me suis régalé ! Puis les copains sont passés au Calidus. J'hésitais à passer du ouvert au fermé… au point que j'ai acheté un Calidus d'occasion, en 2012, sans revendre mon Magni. J'ai conservé les deux pendant environ 6 mois, le temps d'être sûr de m'adapter au fermé. Analyse : le fermé est moins jouissif, moins amusant, mais moins fatiguant en voyage. On gagne en confort ce que l'on perd en plaisir. Et pour les photos, c'est pas top : il y a beaucoup de reflets. Depuis que je suis en Calidus, je ne fais quasiment plus de photos.

 

Du coup, tu retrouvais un peu les travers de ce que tu reprochais au trois-axes ?

 

Tout à fait ! Quand je remonte en pendulaire, qui est désormais ma seule machine ouverte, je prends un plaisir immense ! Mais je vole toujours avec le Calidus, le trois-axes et puis est venu l'hélico.

 

Je vais y venir. Tu as beaucoup de temps libre, dis-donc ?

 

Je suis à la retraite depuis 6 ans, donc effectivement je suis disponible plein pot. Mais avant cela, j'étais assureur, en profession libérale et assez maître de mon temps. Je tiens un petit tableau, que j'ai sous les yeux. En pendulaire, je suis à 876 h, en trois-axes à 407 h, en autogire à 786 h et en hélico à 48 h. Soit plus de 2000 h.

 

Pour un particulier qui ne vole qu'en loisir, plus de 2000 h en 20 ans, c'est conséquent !

 

Oui, effectivement. Il y a beaucoup de raids, puis on est une bande de copains qui volons régulièrement. On a un club sympa d'une douzaine de pilotes, dont la moitié vole bien, en raids entre nous ou dans le cadre d'organisations…

 

Est-ce que le fait d'avoir participé à des raids organisés, en l'occurrence par Air Flash, donc avec un grand professionnalisme, aide pour ensuite partir tout seul ou entre copains ?

 

Ah oui, bien sûr ! Tiens, j'ai oublié de te dire : tout au début, alors que je n'étais pas encore lâché, je me suis inscrit à un raid en Tunisie, avec Zinedine Sadaoui et Gilles Finet (Grand sud évasion NDLR). Ils prenaient des passagers sur les biplaces utilisés en solo. J'ai donc volé notamment en passager de Dominique Méreuze. Quel rêve ! J'étais encore élève, je les voyais s'éclater dans des décors de folie, je me disais "quand je serai grand, je ferai ça !" En revenant, je me suis inscrit au Tour de France ULM. J'en ai fait deux. Les tours de France m'ont enseigné l'autonomie, le goût d'aller plus loin que ce que l'on entreprend tout seul.

 

Tu a donc commencé par le pendulaire, puis le trois-axes, rapidement l'autogire… puis est arrivée la classe 6.

 

Voilà. Au début, sans plus…

 

Ah bon ?

 

Non, je n'étais pas fana. En tous cas pas au début. Puis je me suis dit que j'irais bien essayer, voir un peu ce que ça donne. J'ai essayé un Kompress à Château-Thierry, sur trois ou quatre heures d'apprentissage, chez Heli Light ULM. Le Kompress est une machine très vive, pas évidente à maîtriser. J'étais bien sûr toujours en contact avec Amiens, qui disposait d’un Dynali. Francis, l'instructeur, m'a dit "viens essayer". Changement de machine, un biplace cote cote cette fois, avec un 912 S, beaucoup moins vif que le Kompress. Et un instructeur différent, aussi. Un qui vient de l'ULM, alors qu'à Château-Thierry c'est un professionnel de l'hélico. Donc une approche différente. Je suis allé à Amiens régulièrement, jusqu'à ce qu'il me lâche. Et là, comment faire ? Acheter un hélico, tout seul, c'est un peu de la folie, c'est très cher… mais dans la pratique, trouver quelqu'un, dans la même région, qui en soit au même point que moi, ce n'est pas faisable… jusqu'à ce qu'une opportunité se présente, à un prix très intéressant, avec une cinquantaine d'heures. La machine était à l'usine en Belgique. Je l'ai ramenée à Amiens sur une remorque, où je l'ai prise en main, puis je l'ai ramenée en vol à Epernay.

Puis je me suis entraîné à bien maitriser la machine et c'est à cette occasion que je l'ai plantée ! Je faisais de l’exercice près du sol. C'est un biplace côte-à-côte et quand on travaille en solo, on est manche très en avant pour compenser la différence de centrage. Par ailleurs, je voulais calculer ma consommation et décollais depuis quelques temps avec le plein, n'ayant pas de problème de poids seul à bord. Mais je n'ai pas trop pensé au centrage… seul à bord, réservoir (à l'arrière) plein, machine fort cabreuse. Donc pour travailler au sol, on est limite. J'étais près du sol, j'ai voulu remonter un peu, du manche en avant, vraisemblablement en butée, la machine recule, la queue qui touche le sol. Le rotor de queue s'est désagrégé, la machine était incontrôlable. J'ai fait un 180°, la machine s'est couchée sur le côté droit, presque à l'envers, puis a pris feu immédiatement. Coup de chance, j'ai vu un trou dans la cabine cassée, j'ai pu sortir. Sinon, j'étais cuit ! L'hélico aura été une expérience assez courte pour moi. Dommage. Mais c'est fini, ma femme et mes enfants m'interdisent d’en refaire !

 

Tu as des séquelles ?

 

Des traces de brûlures oui, bien sûr, mais des séquelles, non. J'ai été brûlé à 35% dont 25% au troisième degré. Au début, on n'était pas sûr que je m'en sorte et aussi bien… j'ai une bonne santé, ma peau s'est bien réparée, les greffes ont bien pris. Je m'étais promis de sortir de l'hôpital pour Noël, je suis sorti pour Noël ! Je ne suis pas défiguré, je ne suis pas gêné dans mes mouvements, je suis très heureux de mon sort !

 

Quel bilan tires-tu de ton expérience de la classe 6 ?

 

L'hélico est par nature une machine instable, et un hélico ULM l'est encore plus ! C'est très fin à piloter. Pour moi c'est le top du pilotage. J'avais commencé par le plus simple pour arriver au plus fin, mais il faut être en permanence aux aguets. C'est scabreux, parce que l’erreur n'est pas tolérée.

Je n'ai pas profité du retour sur investissement ! J'ai fait mon apprentissage, puis une quinzaine d'heures en autonomie. Sans mon entourage, j'aurais repris. Pour le plaisir du pilotage. Sans quoi, objectivement, ça n'avance pas vite, même les autogires doivent m'attendre, je consomme plus, c'est exigeant. Le gros avantage, c’est de se poser où on veut. Mais bon, j'ai 69 ans, je vais me calmer un peu…

 

Quel bilan tires-tu, à ce stade, de tes 22 années d'ULM, passant de classe en classe, de la plus simple à la plus exigeante ?

 

Le plus de plaisir, je le prends en pendulaire, indiscutablement. Je l'ai un peu délaissé avec la course à l'armement, naturelle mais pas forcément très sage. J'ai toujours mon Combo 912S, que je vais garder, mais si je devais changer, je prendrais une machine plus légère. En pendulaire, tu glisses dans l'air !

 

Oui, mais on dit que c'est physique, que c'est camion…

 

Ah non ! Même dans les raids… pourquoi est-ce que je suis passé au gyro pour les raids ? C'est d’abord pour ne pas avoir à démonter l'aile aux étapes !

 

Ah, intéressant, c'est la première fois que j'entends ça !

 

Bah oui, le gyro, tu arrives à l'étape, tu mets ta bâche et voilà. En pendulaire, il faut parfois tenir l'aile à plusieurs pour pouvoir la mettre au sol.

L'autogire permet aussi de voler dans des conditions plus venteuses que le pendulaire. Pour le côté joueur, mania, l'autogire ouvert est extraordinaire ! Le fermé reprend l'avantage pour voler en voyage.  

Dans l'ordre, pour résumer : le pendulaire donne le plus de plaisir du vol, puis l'autogire ouvert, vient ensuite l'autogire fermé ; puis le multiaxes, pour ses sensations très atténuées et l'hélico, c’est autre chose, c'est du vol mécanique, en fait. L'autogire aussi, d'ailleurs, c'est son inconvénient. Ce n'est pas glissé, contrairement au pendulaire ou au trois-axes. J'ai aussi de très beaux souvenirs en trois-axes, notamment pendant mes vols avec Thierry Barbier.

 

Ah oui, raconte !

 

En 2011, j'ai volé avec Thierry, un mois, sur la partie Uruguay, Brésil et retour en Uruguay. On a volé au-dessus de Rio, des chutes d'Iguazu… ses portières étaient semi-ouvertes, j'aimais bien ! Puis en 2012, avec lui, j’ai fait la traversée des Etats-Unis, de San Diego à Montréal en se posant dans le Grand Canyon, chez les Indiens… une traversée d'un mois en totale autonomie, en faisant les grands sites des Etats-Unis.

 

Est-ce que ce sont là tes plus beaux souvenirs ?

 

J'ai eu aussi l'occasion de voler en pendulaire à Madagascar, avec Air Flash. Ils avaient organisé un raid avec 6 motos et 3 pendulaires. Quand tu voles en pendulaire à Madagascar, t'es un dieu vivant ! Fabuleux ! Oui, mes plus beaux vols, je pense que c'est là-bas, sur la côte ouest.

Ce que j'aime aussi dans l'ULM se sont les rencontres que l'on peut y faire !

 

A propos de rencontres, parle-nous un peu de ton forum "GOTOpilotes"

 

C'est parti d'une idée simple : mettre en relations des pilotes voyageurs avec ceux qui sont disposés à accueillir. En ce moment ça dort un peu, mais je vais justement réactiver, j'ai été un peu absent dernièrement… (rires) Il y a 150 membres sur plus de 100 terrains. Ça fait une petite famille sympa et ça rend service à ceux qui ont envie de voyager !

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