Les Vieux Déb's
Article paru dans ULMiste n°3, octobre 2010
Voler simple et pas cher : la solution Vieux Déb’s !
Guy Wardavoir est un vieux de la vieille de l’ULM, qui y a effectué quasiment toute sa carrière professionnelle. Depuis quelques années, il cherche un moyen de sauver l’histoire de l’ULM, surtout à travers son patrimoine volant. D’où, en 2009, la création des “Vieux Déb’s”, vieux débris, appellation qui s’adresse aux machines avant tout. Et si cette sympathique initiative cachait en réalité autre chose, comme par exemple la promotion d’une aviation pas chère, réellement plaisante et d’une grande sécurité? Voyons voir…
ULMiste : Guy, tu es à l’origine de l’initiative “Vieux Déb’s”. En 2009, vous avez organisé une première rencontre en septembre, un voyage d’anciens ULM pour rejoindre le Tour ULM à Cabanac début août, le salon de Blois. Quel bilan tires-tu de ces premières réjouissances ?
Guy : Un bilan contrasté : le premier rassemblement des Vieux Déb’s a effectivement été un succès total compte tenu d’une météo et d’une participation exceptionnelle de figures historiques de l’ULM, mais je pense qu’il sera difficilement possible de faire mieux un jour. Je m’explique. Beaucoup de pilotes des débuts de l’ULM ont eu un grand plaisir à se retrouver comme on peut être heureux en retrouvant un copain d’école sur “copains d’avant”, “trombinoscope” ou “facebook” mais une fois le rendez-vous, convivial et joyeux, passé, chacun retrouve sa vie et ses activités qui pour la plupart sont bien différentes et éloignées des activités d’il y a 25 ans. Sans parler des problèmes de santé inévitables des uns et des autres qui font que beaucoup sont venus en voiture. Il est donc quasiment certain qu’un rendez-vous annuel serait voué à l’échec.
Quelques rares sont venus en vol avec de vieilles trapanelles et je crois que pour eux cela a été à nouveau une révélation de redécouvrir les capacités de leur appareil et le plaisir pris à faire de petites balades sans prétention, à basse vitesse et peu de risques en cas de panne.
Si ce “mouvement” a un avenir, il repose plutôt sur cet aspect : faire redécouvrir la simplicité, le plaisir, le peu de risque, la convivialité à partager, qui existe avec un ULM simple et peu coûteux en récupérant par la même occasion les appareils anciens, en les restaurant et en les utilisant.
En ralliant le Tour ULM et en participant au salon de Blois c’est le message que je souhaite faire passer avec mes acolytes anciennement ou fraîchement convaincus !
Nous avons rejoint le Tour à Cabanac sans problème particulier en ayant zigzagué au gré des vents, tout en respectant scrupuleusement la réglementation.
L’accueil sur tous les terrains, ULM, aérodrome, ou vache, a été très particulier, comment dire, presque affectueux ou attendrissant, comme lorsqu’on voit une vieille voiture en balade sur la route, le conducteur est d’emblée sympathique et cela se sent dans les rapports avec les gens. En tous cas, pas le type d’accueil auquel je ne m’habitue toujours pas lorsque j’arrive avec mon haut de gamme quelque part… Alors que de mon côté, je suis le même et vais au devant des gens, alors où est le problème… ?
Bref, hormis le plaisir certain qu’il y a à revivre avec nos vieilles trapanelles, les moyens employés me semblent les bons pour sensibiliser la communauté ULM à l’urgence de sauver nos vieux appareils. De nombreux pilotes rencontrés sur les terrains ou à Cabanac m’ont incité à développer cette démarche mais reste à trouver les moyens pour les inciter à être actifs dans cette démarche…
De mon côté j’ai la chance d’avoir une infrastructure importante permettant de stocker dans un premier temps des machines, en attendant qu’une dynamique plus importante se développe pour les restaurer et les faire voler mais j’arrive bientôt au bout de mes possibilités, 7 appareils restaurés et 6 stockés…
Je continue de penser que la création d’un musée “vivant”, regroupant des appareils à restaurer, d’autres restaurés et volants, des documentations, des affiches, des compétences, etc., comme celui de la Ferté-Alais, d’Angers, il y en a beaucoup d’autres pour les avions, devrait être envisagée…
ULMiste : Le parallèle avec l’auto de collection semble intéressant, dans la mesure où selon les courants et acteurs, on ne sait pas toujours s’il s’agit de la simple préservation d’un patrimoine ou d’une forme de nostalgie du genre “tout fout le camp c’était mieux avant”. Où se situeraient les Vieux Déb’s, ou, pour être précis et direct, y-a-t-il une part de “c’était mieux avant” dans votre démarche ?
Guy : Ni l’un ni l’autre bien au contraire ! À l’origine de notre mouvement, juste le hasard ; en tant que Directeur des vols d’un Tour ULM je prenais contact avec un aérodrome pour préparer la venue future du Tour et là, en passant devant un Quick MX d’une vingtaine d’années mais cependant neuf et poussiéreux, le responsable m’indique que cet appareil encombre et qu’il est à vendre...
Quelques pas en arrière et aussi quelques années car mon premier appareil a été un Quick.
L’affaire est vite faite et peu de temps après je découvre à nouveau ce qui m’avait enthousiasmé quelques années plus tôt…
Oui, c’est effectivement la nostalgie qui m’a motivé à ce moment-là mais en même temps j’ai réalisé qu’aucune machine actuelle n’apportait autant de plaisir pur et qu’il était conciliable de les sauvegarder tout en les redécouvrant : ces appareils sont toujours d’actualité… Aujourd’hui on sait piloter, sur ces appareils on savait voler !
Voler lent et pour moi essentiellement en propulsif avec un moteur simple 2 T si possible, qui fonctionne très bien si entretenu, que je peux réparer facilement (moteur ou cellule) et porter avec mes petits bras, apprécier de voler à l’altitude minimum réglementaire sans craindre de se poser court sur à peu près n’importe quelle surface sommaire, zigzaguer, légalement, sous, à droite, à gauche, au-dessus des zones ou obstacles, forêts, ZRT et autres à petite vitesse, un alti au poignet, une bonne nav à l’ancienne, pas de tableau de bord d’Airbus… Alors oui, effectivement, pour cet aspect du vol nos vieilles trap’s c’était mieux avant, en plus c’est pas cher et ça rapporte gros de plaisirs simples oubliés… Trouver aujourd’hui un appareil moderne et simple qui corresponde à ce cahier des charges, c’est loin d’être facile et en plus c’est cher !
Oui, aussi, pour nos machines modernes, qui permettent de traverser la France en 3 heures, confortablement installé au chaud ou au frais et à l’abri du vent et éventuellement de la pluie avec des équipements sophistiqués permettant de faire au plus vite et au plus court… Train rentrant, pas variable, EFIS, GPS, transpondeur, radio, P.A… Mais combien sortent vraiment de la petite balade et ont vraiment la compétence et une pratique régulière pour gérer autant de complexité ?
Les plaisirs de musarder à moto ou en voiture ne sont en rien comparables et je crois qu’il en est de même entre l’ULM d’hier et celui d’aujourd’hui.
L’idéal, c’est d’avoir les deux et c’est possible car préserver l’ULM d’hier est abordable, sous réserve bien sûr d’être un minimum bricoleur.
ULMiste : Penses-tu que dans 20-25 ans, les Vieux Déb’s feront voler des MCR, CT, Dynamic et autres, en regrettant le temps “mieux avant” où tout le monde savait se contenter de telles machines aux plaisirs si simples ?
Guy : Pourquoi pas si les pilotes sont devenus plus doués, au point de les poser ou de les décoller sans problème sur un terrain de 80 m, les faire voler en palier à 60 à l’heure, leur réparer le train ou une aile compète en un après-midi, apprécient de voler la tête à l’air, sans verrière et sans portes et les trouvent à 2500 € ?
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