Paramoteur bientôt légal ?
Article paru dans ULMiste n°1, mai 2010
Paramoteur bientôt légal ?
Le vendredi 9 avril dernier, se tenait au siège de la FFPlUM une réunion destinée à préparer des changements règlementaires sur l’identification des paramoteurs, qui pourraient également un jour concerner d’autres classes. ULMiste a obtenu de pouvoir y assister afin de vous en rapporter les éléments.
Pourquoi ?
Les règles actuelles sont difficilement applicables pour les paramoteurs, donc pas toujours appliquées. Illustration par deux exemples. Un professionnel qui fait du biplace possède un ensemble à décollage à pied et un autre à roues, afin de s’adapter à la condition physique de ses passagers. Selon les règles actuelles, cela fait donc deux ensembles, deux cartes d’identification, soit deux identifications. D’où l’obligation pour le professionnel d’acheter deux ailes, qui dans la plupart des cas seront strictement identiques, vu qu’il est difficile d’envisager de changer l’indentification, parfois plusieurs fois par jour.
Autre exemple, les écoles. Le parapente qui sustente un paramoteur est conçu pour voler dans une fourchette de poids : mini et maxi. Ainsi, en école, l’aile doit être adaptée à la masse de l’élève. Le moteur, lui, dépend également de son poids, de sa corpulence, etc.
Le problème est donc semblable à celui du biplace : on se retrouve avec un grand nombre de combinaisons diverses, d’où de nombreuses cartes d’identification, etc.
Aujourd’hui, peu de professionnels respectent scrupuleusement ces règles, même parmi ceux qui sont farouchement opposés au moindre allègement règlementaire. Ils volent donc sans identification, même si les papiers sont à jour. L’administration en est consciente et répond donc d’autant plus favorablement à la demande de changements de la FFPlUM.
Autre problème, qui concerne tous les pilotes : les dossiers techniques. Bien peu de constructeurs proposent à la fois l’aile et le moteur. Nous avons en majorité des constructeurs de châssis moteurs d’un côté et des fabricants d’ailes de l’autre. Il se trouve donc très peu de dossiers techniques complets qui permettent aux utilisateurs de bénéficier d’une identification en appareil de série. La majorité des 3500 paramoteurs identifiés sont des “constructions amateur”, au nom de leurs propriétaires, alors qu’en réalité ils se composent de l’assemblage de moteurs et d’ailes construits en série. Or, si l’esprit de la loi est que la responsabilité doit être partagée entre le constructeur et l’utilisateur, dans le système actuel seul l’utilisateur endosse la responsabilité de son ULM, en se déclarant “constructeur”.
Voilà longtemps que les divers acteurs réfléchissent à une solution acceptable par tous et voilà qu’une idée a germé, qui fut donc présentée aux représentants de la DGAC ce 9 avril. C’est Joël Amiable, notre dynamique DTN, qui menait la danse. Il avait invité tous les constructeurs et importateurs de parapentes, ainsi que les constructeurs de paramoteurs.
Seuls 5 d’entre eux étaient présents, mais la majorité avaient manifesté leur accord sur le fond. Guy Léon-Dufour (Adventure), Heniu Dyduch (ITV), José Ortega (APCO), Sylvain Piroche (NOVA) et Mike Campbell-Jones (Paramania). Etaient également présente la FFPlUM : Joël Amiable et Dominique Méreuze qui ne résista pas à la tentation d’un petit discours d’introduction avant de prendre la route pour Friedrichshafen. Jacques Tronel, qui travaille sur la refonte des formations d’instructeurs, était présent également, tandis que la commission fédérale paramoteur était absente. Côté DGAC, Hugues Le Cardinal et Claude Mas, du pôle certification et navigabilité. Et donc ULMiste, P-J pour poser les questions débiles et Ben, pour sa parfaite connaissance du vol libre.
Ce qui est proposé
Voilà déjà quelques temps que l’idée circule. Il s’agissait ce jour-là de préciser le dossier et débattre de points de détails qui n’en sont pas toujours afin de modéliser et mettre au propre les propositions.
Plutôt qu’un dossier technique qui aujourd’hui se rapporte d’avantage au moteur qu’à l’aile, il est proposé une approche opposée, assez logique puisque c’est l’aile qui porte l’identification. Il est donc demandé aux fabricants d’ailes de déposer à leur convenance des dossiers techniques spécifiques paramoteur, qui comporteraient dans l’état actuel du dossier les éléments suivants : marque, type, modèle, masse mini, masse maxi. Puis un manuel d’utilisation qui précise quel type de moteur peut être utilisé : accroche, sens de rotation, limitations de puissance, écartement, etc.
Ces ailes, déclarées aptes au moteur par leurs fabricants, rejoindraient une liste centralisée par la DGAC, afin que les propriétaires puissent obtenir une identification “série” si leur moteur est conforme à ce que peut porter l’aile.
Ainsi, la notion de monoplace ou biplace disparaît, seules comptent les masses maxi et mini. On pourra donc, si les moteurs sont conformes, utiliser une aile donnée en mono ou en bi, à pied ou sur roulettes, sans changer d’identification, laquelle, pour rappel, peut être conservée à vie sur les paramoteurs, depuis 2004.
Ce serait donc une avancée significative et bravo à ceux qui ont eu cette lumineuse idée !
Débats
Quelques petits débats vinrent émailler cette réunion. L’idée de systématiques tests en vol (contrôle étatique en amont), par exemple, avancée par Claude Mas de la DGAC. Les acteurs du vol libre, qui sortent de près de 25 ans de luttes pour mettre au point les protocoles de tests de l’imparfaite et non obligatoire norme EN, se sont aussitôt opposés à ce que l’on imagine refaire tout ce binz pour le moteur. Cette idée était d’autant plus malheureuse, qu’elle créerait un précédent dans l’ULM, qui reste à ce jour intégralement déclaratif.
Le débat autour d’une éventuelle déréglementation totale s’invita également à fête. Si les acteurs du paramoteur, consultés voilà deux ans, s’y sont montrés très majoritairement opposés, l’idée refait régulièrement surface, puisque c’est désormais la DGAC elle-même qui y est favorable, avec comme argument majeur et recevable que cela résoudrait tous les problèmes d’un seul coup. Parce que si cette réunion ne concernait que l’identification, bien d’autres problèmes se posent aux paramoteurs, notamment la formation théorique à peu près totalement inadaptée, les radios, les hauteurs minimales de survol, etc. Concernant les hauteurs, tout aéronef y est soumis, que sa navigabilité soit réglementée ou non, il n’y a donc aucun espoir d’évolution de ce côté-là.
Le principal argument avancé par le plus farouchement attaché au maintient des règles, Guy Léon-Dufour, est qu’une absence de brevet serait une menace pour ses écoles. Ce à quoi Ben (ULMiste), a répondu avec une certaine véhémence que dans le vol libre, où aucun brevet n’est obligatoire, personne n’apprend à voler seul et les écoles voient même un très fort taux de retour à la formation, en stages de perfectionnement. Cependant que dans l’ULM “à brevet”, on considère (à tort) que l’obtention de ce brevet est la fin d’un cursus, alors qu’elle ne devrait être que son début.
Questions
Pour terminer, P-J (ULMiste) a demandé si ces dispositions pouvaient être transposées au pendulaire, qui a le même problème, certes dans une moindre mesure. Réponse amusée de Hugues Le Cardinal : “si la FFPlUM fait une demande en ce sens, nous étudierons la question”. Quoi qu’il en soit, la question se posera d’elle-même, puisqu’il est prévu qu’à terme les identifications de nos ULM soient définitives. Or, pour qu’elles puissent l’être sans imposer qu’une aile de pendulaire donnée soit condamnée à ne supporter que le type de chariot et moteur avec lequel elle fut initialement identifiée, il faudra bien lui appliquer le même principe que celui qui se met en place pour le paramoteur. Autre question : c’est pour quand ces réjouissances ? Réponse : printemps 2011, c’est-à-dire très vite.
Arrangement à l’amiable !
En définitive, ces dispositions, si elles s’appliquent, résolvent le problème de l’identification des paramoteurs. Même s’il est probable que certains, qui seront peut-être obligés de changer leur moteur ou leur aile pour se mettre en conformité, n’y trouveront pas que des avantages immédiats. Dans le même temps, elles responsabilisent les constructeurs de parapente, dont l’oreille attentive et bienveillante mérite d’être saluée. On constate également l’extrême bonne volonté de la DGAC, qui pourrait, pour encore plus s’impliquer et donner un signe fort, en tâter un peu. Hugues, Claude, allez faire un petit stage de paramoteur, vous verrez à quel point c’est au moins aussi bien que les TB20 du SEFA !
Déréglementation paramoteur : oui ou non ?
Luc de Tilly, Président de la commission paramoteur FFPlUM
“Cela fait maintenant plus d’une année que la FFPLUM, pour la commission paramoteur, a engagé des discussions approfondies avec un groupe de travail spécialement créé à cette occasion au sein de la DGAC, pour revoir un certain nombre de points méritants notre attention.
Rien n’est encore enteriné sur le plan opérationnel et administratif, bien que les discussions progressent, et les acquis se précisent jour après jour.
Si la question posée est : dérèglementation ? La réponse de la FFPLUM qui me mandate est NON.
Surtout pas.
Cela produirait un tel déséquilibre, vis-à-vis de tout notre environnement : administratif, légal, juridique, assurances, sécurité, relations locales avec les riverains, les élus etc....qu’imaginer ce genre de situation ne relève que de l’utopie.
Or, je souhaite mener à bien ma mission le plus efficacement possible.
Nous avons donc choisi de traiter les sujets les plus simples à revoir, et adapter la règlementation de la CLASSE 1, c’est-à-dire PARAMOTEUR de façon à ce qu’elle soit :
1) adaptée à la pratique du Paramoteur, tout en ne sortant pas des lignes générales appliquées aux autres classes (les 4 autres)
2) comprise des usagers et par là-même respectée et appliquée.
3) formulée par des professionnels tant du parapente que du paramoteur, pilotes et instructeurs, fabricants et utilisateurs, fonctionnaires et élus, connaissant par leur vécu quotidien, les très grandes limites des textes actuels, inapplicables à date sur bon nombre de points (surtout en école pour l’instructeur).
Cela implique une simplification et une adaptation raisonnée des textes actuels.
Nous ne sommes pas loin d’un résultat, l’idée étant de produire une identification unique et définitive par paramoteur, attachée à la voile, quelque soit le GMP ou le chariot qui se trouve en-dessous.
Bien entendu, les “instructions” précisent les règles de l’art pour ne pas se mettre en danger, comme “constructeur amateur” et respecter les recommandations de masse et puissance préconisées par les fabricants identifiés et reconnus sur une liste publique.
Les autres chantiers prévus visent :
- l’article du 13 mars 86 qui définit les plateformes permanentes, relativement à l’avis du maire, qui souvent n’y connaît rien et bloque le processus sans vouloir même étudier la question.
- la formation des instructeurs.
- la formulation du QCM théorique (évaluation de la pertinence de certaines questions).
- la notion de baptêmes itinérants, c’est à dire non basés sur une PF homologuée, sans pour autant tomber dans l’engrenage de la “manifestation aérienne” et l’incursion préfectorale.”
Thierry Simonet, instructeur et constructeur (Back Bone)
“Pourquoi simplifier, du moins en apparence, quand on peut tout simplement déréglementer ? Ces nouvelles dispositions, si elles entrent en application, ne résoudront, moyennant l’adjonction de contraintes qui n’existent pas actuellement pour les fabricants de voiles, qu’une infime partie du problème. Quid de la radio, du théorique absurde, etc. ?
La déréglementation du paramoteur me semble une évidence absolue tant elle serait en cohérence avec tous les autres secteurs comparables : tous les véhicules à moteur de faible puissance et au rayon d’action réduit sont déréglementés en France ! Scooters, voiturettes, bateaux de moins de 6cv, etc. Et, sur l’eau comme dans les airs : on peut traverser les océans sans permis, à la voile, mais il faut un permis pour traverser un lac sur un gros hors-bord ou faire du jet-ski dans une marre d’eau… idem chez nous : on peut partir en cross sur des centaines de kilomètres en libre, mais si on se met un moteur pour tourner en rond autour du terrain, il faut un brevet, une identification, un terrain déclaré ou homologué etc. C’est pour le moins incohérent !
Je vends des machines en Nouvelle-Zélande. Ce pays a fait le pari de la déréglementation, alors qu’avant cela les paramoteurs étaient, comme ici, des avions comme les autres. Tout va bien pour eux, personne ne songe à se former tout seul, et j’y suis même allé, à leur demande, former un instructeur ! Sur la plage, sans rien demander à personne et sans nous soucier des cartes jaunes et autres autocollants, en toute légalité ! Le contre exemple Britannique parfois présenté par les adversaires de la déréglementation (qui sont en plus pour davantage de règles !), ne tient pas : là-bas, on peut voler sans brevet ni rien, mais uniquement sur sa propre machine ! Tu veux apprendre, tu achètes d’abord, c’est forcément un frein ! Alors que, dans le vol libre par exemple en France, les écoles autour de chez moi (Gap) ont 10 élèves quand j’en ai 2 ! Lesquels élèves reviennent en perfectionnement. Avec les règles actuelles du paramoteur, beaucoup de candidats sont refroidis par le théorique abscons, et heureusement que l’on peut tout de même les faire pratiquer un peu pour les motiver ! Vu qu’en plus, il faut sortir 40 € et attendre de 3 à 6 mois pour avoir une carte jaune en PACA, entre 15 et 20% d’anciens élèves volent sans brevet et plus encore sans identification. Le brevet n’empêche pas l’infraction, ça se saurait, il n’y a qu’à voir sur les routes… aussi, déréglementons, ou imaginons un brevet fédéral, mais la situation actuelle, contrairement à ce qui se dit, est bel et bien un frein au développement du paramoteur. Toutes les activités déréglementées, même à moteur, se portent très bien et les écoles sont pleines, si les exigences techniques de conduite de l’engin le nécessitent.“
Note de la rédaction : nous avons tenté d’organiser un débat entre Thierry Simonet et Guy Léon-Dufour, patron d’Adventure et contre la déréglementation. Thierry était partant, le “siège d’en face” est resté vide...
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