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Une journée chez Flylight

Article paru dans ULMiste n°6, octobre 2011

 

Une journée chez Flylight

 

Pour poursuivre nos visites aux pros initiées au numéro 3, nous sommes allés chez Flylight. Le simple nom évoque un programme réjouissant et nous ne fûmes pas déçus.

 

Pierre-Jean le Camus

 

Se rendre à Sywell exige un minimum d’efforts : une fois sorti du Shuttle, rouler du mauvais côté ; causer la langue puisqu’ici on ne veut pas parler français comme tout le monde ; vérifier l’état de ses amortisseurs, les autoroutes, aussi nombreuses que gratuites (et c’est bien la seule chose qui soit à la fois nombreux et gratuit), montrant un état douteux. La prudence invoquerait également d’emmener son manger, ce que nous ne fîmes pas car il est grisant, de temps en temps, de vivre dangereusement.

Après 3 petites heures de route, on y est : Sywell Airport. Nous arrivons en fin d’après-midi et il fait, exceptionnellement, beau. A proximité, nous voyons évoluer une patrouille de voltige. Aux figures qu’ils tournent, Benjamin, connaisseur, me dit que ce doit être des Extra 300 et il est tout trépignant d’impatience d’arriver avant qu’ils n’aient terminé leur programme... le temps de nous perdre aux nombreux carrefours n’indiquant que “all routes”, le programme était terminé… pour aujourd’hui !

 

Les gens

 

Flylight : “Vole léger”. Une dizaine de personnes et trois fois plus de machines, entièrement dédiées au vol ultraléger, motorisé ou non. Les deux animateurs principaux sont Ben Ashman et Paul Dewhurst. Leurs CV sont si chargés qu’il sera difficile de les détailler, à moins de publier un numéro spécial. Après avoir construit son premier delta alors qu’il était encore étudiant, Ben a commencé sa carrière comme instructeur de libre puis d’ULM et concepteur chez divers fabricants d’ailes. Ce sont ces 30 années d’expérience qui sont mises à profit de Flylight, à la conception des machines de leur cru. Artiste accompli, il est aussi l’auteur de la plupart des dessins humoristiques visibles dans la communication de beaucoup de constructeurs à travers l’Europe depuis les années 80, ainsi que de vidéos visibles sur le net. 

S’agissant de Paul, également instructeur d’à peu près tout, on pourrait résumer sa présentation au fait suivant, qui mettra tout le monde d’accord : il est le seul humain à avoir été médaille d’or mondiale, à plusieurs reprises, dans quatre classes différentes : pendulaire et trois-axes, monoplace et biplace.

Ben nous attend et demande d’emblée ce que nous voulons voir. “Tout ce qui est visible ! – pas de problème, rien n’est caché”. Parfait, nous allons donc tout voir, y compris les projets en cours.

 

Les jouets

 

Flylight est surtout connu ces dernières années pour son Dragonfly, micro pendulaire monoplace improprement considéré comme une motorisation auxiliaire. Ci-dessus nous voyons sa dernière évolution, surmontée d’une aile sans mât sur base de Discus, spécialement développée par Aeros, dont l’importation est assurée sur place. Après plus d’un an de mise au point, une version qui leur convient est désormais commercialisée, moyennant, selon eux, des évolutions imperceptibles en performances et comportement. Dans le même temps, la version de base, équipée d’un moteur deux-temps (au lieu du  quatre temps Bailey), d’un train fixe et d’une aile simple surface, devient un concept à part entière, sous le nom de Motorfloater. Son lancement a provoqué la commande ferme de dix Dragonfly toutes options ! A noter que malgré le dépouillement, on dispose tout de même de frein au pied !

 

Toujours au rayon ultraléger, on opère ici le remorqué delta biplace en école, on construit et entretien, notamment le Doodle Bug dont la fabrication a cessé. L’importation du ZJ Viera se suit mollement, cette machine souffrant, selon eux, d’un relatif manque de robustesse. Pour la rigolade, un Lazair, machine âgée de plus de 30 ans, a été motorisé par deux propulseurs électriques de modèles réduits ! Un Dragonfly fut aussi testé en électrique, le tout sans résultat probant : poussif, autonomie ridicule, masse élevée, très cher. En attendant les progrès espérés depuis la nuit de l’ère moderne, un Alatus, également importé ici, est en cours de motorisation hybride à l’université de Cambridge.

 

Du côté des gros ULM, Flylight est importateur des SkyRanger et Nynja BestOff et de Air Création pour la Grande-Bretagne. Pour les productions BestOff, ils sont également fortement impliqués dans la conception, puisque, dans le cadre de la certification Britannique, ils mettent au point les évolutions, qui pour beaucoup sont ensuite reprises sur la série pour le monde entier, comme par exemple les dispositifs qui permettent d’optimiser la sortie de vrille. Les SkyRanger sont presque tous pliables ici et volent très bien avec un HKS, pendant que chez nous le 912 de 80 cv paraît léger à certains. Il faut croire que la puissance embarquée est inversement proportionnelle aux talents du pilote…

Les dispositions réglementaires étant ici ce qu’elles sont, les machines importées ne peuvent être vendues qu’en kit et utilisées exclusivement à des fins de vols de loisirs non rémunérés. La seule alternative pour le distributeur est de se plier aux très lourdes exigences administratives et de devenir lui-même officiellement constructeur des ULM qu’il importe, ce qui l’autorise à les utiliser dans le même cadre que les machines construites sur place. Il en résulte que ce qui est censé au départ protéger la production nationale ne s’avère pas très efficace : l’absence de véritable concurrence ne force pas les constructeurs à se plier aux exigences d’une clientèle de moins en moins avertie. Résultat des courses, le marché s’essouffle. Flylight, avec le Dragonfly et dérivés, est désormais le premier constructeur Britannique d’ULM, avec une production établie à environ 25 unités par an, dans un atelier de moins de 100 m2… production essentiellement destinée à l’export. A noter que les pendulaires Air Création sont propulsés par des hélices Kiev Prop, dont Paul affirme qu’elles poussent plus, ont un meilleur rendement et font moins de bruit que les Arplast d’origine !

On observera également que le Team Eurostar exploité en école ne comporte ni peinture ni option. Seule façon de rester (limite) dans les clous !

 

Autrement

 

L’aérodrome de Sywell, c’est aussi une activité incroyable en pleine semaine hors congés, une grosse école hélico qui exploite entre autres un R66 alors qu’en France le premier exemplaire vient à peine d’être livré, la patrouille de voltige 2Excel dont on ne sait plus trop si le regard est attiré par les avions ou les hôtesses, des écoles avion, un hôtel restaurant, des avions de collection, des constructeurs amateurs, à quelques encablures d’une ribambelle de musée aéronautiques, dont bien sûr celui de Duxford ! Finalement, la qualité de la bouffe et des autoroutes s’oublie vite, chez les aviateurs Grands-Bretons.

 

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