Parabatix !
Article paru dans ULMiste n°7, décembre 2011
Parabatix
Le cirque, ce n’est pas mon pain. Le vol motorisé, de surcroît ultraléger, est une source de sensations visuelles, olfactives et intellectuelles, l’adrénaline vient collatéralement et n’est que très rarement une raison pure. Certes, j’aime voler bas, caresser les épines de blé avec mes bottes, passer entre les arbres, m’engouffrer dans le lit d’une rivière, mais c’est surtout pour savourer le changement de la perspective, l’instant féérique où l’horizon s’ouvre, quand l’être rampant devient demi-dieu, le moment du passage dans la dimension cadeau. J’ai été donc plutôt sceptique concernant l’intérêt des courses aux pylônes en paramoteur. D’autant plus que, par le biais de Peter Bessenyei, j’ai pu suivre l’évolution du Red Bull Air Race, nettement plus spectaculaire de par le dynamisme et le risque accrus, mais qui, finalement n’a pas vraiment contribué a la promotion des sports aériens…
Il se peut toutefois, que je sois devenu vieux. Ces choses arrivent, vous verrez vous-mêmes (ce que je vous souhaite). Il se peut que ma vision des choses soit dépassée, tout comme mes valeurs. Les jeunes d’aujourd’hui ont probablement besoin de sensations fortes, de décharges d’adrénaline, d’action. Nous nous lamentons que nouzautres paramotoristes pratiquants sommes de gens peu doués (pour ne pas dire des branquignoles), des sous pilotes ridicules, que notre moyenne d’âge est décevante, que nous manquons du sang nouveau. Et si, pour faire venir des jeunes titans, il faut passer par le cirque ? Espérons seulement qu’une fois l’appât acrobatique consommé, la découverte d’autres horizons et de sensations amènera au moins une partie des apprenti-gladiateurs du paramoteur vers des exploits à la Laurent Salinas et Marc Coffinet. à travers la France, l’Europe et qui sait encore…
Jusqu’ici c’était la version officielle. Digne d’un « vieux déb’s » n’est-ce pas ? La vérité vraie c’est que j’ai assisté à l’Icarobatix et j’ai été moi-même emporté par le show. L’ambiance était tellement sympa, que j’ai même décidé d’organiser une telle manifestation à Budapest l’été prochain. Mais de quoi parlons-nous au juste ?
Les meilleurs pilotes paramoteur actuels s’affrontent dans une course aux pylônes au ras du sol. C’est une vraie course contre la montre, même si la priorité absolue est à la sécurité. La preuve en est : même en automne, les participants ne tombent pas comme les feuilles mortes, ou comme les médisants l’aimeraient. Et ce n’est pas parce que Mathieu Rouanet, Paco Guerra, Pascal Vallée ou les autres ne se donneraient à fond. Simplement : leur niveau de compétences augmente leur marge de sécurité au-delà de ce que le « commun des mortels » serait capable de soupçonner. C’est vrai en plus, je les ai vus gérer avec réussite totale des situations d’urgence qui paraissaient sans espoir. Et tout cela avec la nonchalance des immortels, bien sûr. Comment est-ce possible, en volant si prés du sol ? Le vieux lieu commun de pilote : « altitude, vitesse, savoir-faire, de ces trois facteurs, la présence simultanée d’au moins deux est nécessaire ». Certes, la vitesse d’une voile de paramoteur ne peut être reconverti en altitude, tels les 700 km/h d’un P51 modifié volant au ras des pâquerettes a Reno, (bon, l’exemple n’est pas le mieux choisi, au vu de ce qui s’est passé dernièrement), mais cette vitesse confère une maniabilité démoniaque aux Dudek Hadron, Ozone Viper 2 et autre Paramania GTR utilisés. Évidemment, il faut être vif et réfléchi à la fois, les gestes doivent être idéalement dosés, appliqués avec la précision d’un chirurgien et la détermination d’un psychopathe. Il faut avoir la forme et le mental. Là, c’est vrai, il y a un piège pour les spectateurs : ces saltimbanques du ciel ont l’air hyper cool, ils donnent l’impression que c’est fastoche. A le voir, Alex Mateos est tout sauf un athlète qui, tout en grimaçant et transpirant, réussit un terrible tour de force. Franchement, non. Il a l’air de s’amuser avec la légèreté et la nonchalance d’un enfant, (qu’il est encore dans l’âme, probablement…). Cette illusion est donc dangereuse, car cela peut nous inciter à essayer chez nous.
Le jeu le plus simple consiste à contourner les pylônes (confectionnés en tissu léger et gonflés) dans un ordre bien défini. Le chrono est démarré et arrêté par le contact avec un piquet mobile. C’est le Speed Race. Les choses se compliquent quand il faut collecter des objets le long du parcours, voire même qu’il faut les déplacer d’un champ à un autre. Les objets en question peuvent être des ballons de taille différente que l’on peut faire rouler ou des anneaux qu’il faut enfourcher avec les pieds. Là, il s’agit du Bonus Race. Une autre épreuve consiste à exécuter un certain nombre de figures dans un laps de temps déterminé. C’est le compétiteur qui choisit la tactique, le parcours et l’ordre d’exécution, le meilleur temps gagne. C’est le Freestyle Race. Et puis, le bouquet final, c’est le Special Sky races, un savant mélange de tous ces éléments, et bien plus encore.
Bien évidemment, il y a une limite de temps absolue, au-delà de laquelle le compétiteur est pénalisé du nombre de points maximum.
Le parcours peut être installé dans un espace aussi clos qu’un stade de foot. L’inventeur de Parabatix, Pascal Campbell Jones (oui, le fils de Mike, celui qui a tout changé avec les voiles à profil reflex) a fait exprès de tout prévoir pour que ce cirque volant puisse être installé même dans les centre villes. Les compétiteurs sont équipés de caméras Gopro afin que le spectacle puisse aussi être consommé ultérieurement devant les écrans télé ou sur les ordinateurs. Un accent particulier est mis sur l’aspect grand spectacle.
Il y en a qui disent que c’est le show qui fait tourner le monde. Ou la tête (ou le schlimblick).
Nous sommes curieux de voir ce que le Parabatix va nous apporter. Il est indéniable, qu’il y a quelque chose qui se passe. La meilleure preuve est la nouvelle discipline sportive de la FAI, qui s’est largement inspiré de cette initiative : la Slalomania.
Une chose est sûre : les sportifs impliqués méritent notre respect et notre sympathie.
Faisons leur confiance.
Mais comment ça marche ?
Les Parabatix sont organisées par une structure commerciale, le modèle étant inspiré par les Red Bull Air Races. Il s’agit d’une SAS dont les associés principaux sont Pascal Cambell-Jones (l’initiateur) et Mathieu Rouanet, créée en 2010. L’idée est d’emmener le paramoteur vers le public, plutôt qu’attendre qu’un jour, éventuellement et par hasard, le public ne s’intéresse en masse au paramoteur. Avec ce Parabatix, le public voit toute la course du début à la fin et comprend ce qu’il se passe, au contraire des compétitions traditionnelles lors desquelles l’essentiel se passe loin du regard. Tout comme le modèle, il s’agit donc tout à la fois d’un show et d’une compétition et à ce titre les « showmen compétiteurs » sont rémunérés, quel que soit le classement final. C’est ainsi que les meilleurs mondiaux de la discipline sont présents à chaque étape, pour le plus grand plaisir des spectateurs. Même si l’image que donne ce spectacle ne correspond en rien à la pratique réelle de l’écrasante majorité des pratiquants, cette publicité donnée à l’ULM mérite d’être saluée et c’est à ce titre que nous proposons le présent dossier.
C’est quoi ?
En quoi consistent exactement les courses et comment départage-t-on les concurrents ? Il y a plusieurs courses autour des pylônes, dont certaines sont compliquées par le fait qu’il faut soit déplacer des anneaux (que l’on attrape aux pieds), soit un ballon (que l’on tape un peu comme on peut…). Chaque course est différente et les pilotes doivent tourner autour de trois pylônes gonflables de douze mètres de haut, à basse hauteur. Le chronomètre, placé entre deux pylônes de huit mètres qui matérialisent la porte de départ/arrivée, est lancé au moment où, à l’entrée de la course, le pilote touche un petit poteau avec son pied et inversement en fin de course. Le temps total de chaque course se compte donc en dizaines de secondes et les écarts sont de moins de cinq secondes sur la totalité des épreuves, ce qui participe au suspens, donc au spectacle. Le déplacement des anneaux et ballons ajoute des bonus au temps total. Petit tour d’horizon des différentes épreuves, qui peuvent évoluer d’une course à l’autre.
Flyman Race / Octopus Race
Courses simples dont le vainqueur est le plus rapide sur l’étape. Sur ces épreuves comme pour les autres, les meilleurs dépassent à peine les 30 secondes et des vitesses de plus de 60 km/h sont atteintes, ce qui en paramoteur et si près du sol est considérable !
Balls Race
Sur cette épreuve, en plus du temps le plus court, il faut taper dans les ballons (ronds bleus) pour les sortir du cadre. La réussite de l’exercice donne du bonus au temps effectué.
Ici, le but est d’attraper l’anneau (cercle orange) et de le déposer dans le « drop zone ». Il peut y avoir plusieurs de ces anneaux.
Sur la durée totale de la course, les meilleurs auront volé en tout moins de cinq minutes, auxquelles s’ajoutent les démonstrations pour le plaisir. Le Parabatix est une grande fête aérienne qui s’organise sur trois jours : une journée d’entraînement et deux jours de course-spectacle. Le programme précis des épreuves peut varier d’un événement à l’autre et même le nom peut s’adapter, comme c’est le cas pour la course initiée à la Coupe Icare cette année en septembre et qui s’appelle Icarobatix. Le pool des pilotes va également évoluer, pour le départ seuls les vraiment tout meilleurs ont été retenus. Le programme des présentations à venir va de la Hongrie au Brésil en passant par Dubaï et la Thaïlande, ainsi, bien sûr, que la France !
Les organisateurs se contentent de vendre une prestation clés en main, à la structure qui accueille de trouver ses financements, qui se basent essentiellement sur des partenariats commerciaux ou de la billetterie.
La toute première édition a rassemblé près de 2000 spectateurs sur la base ULM Midi-Pyrénées près de Montauban (82) ! A n’en pas douter, il s’agit là d’un bon moyen de faire connaître nos activités, voire de pousser des pilotes paramoteur à se perfectionner, ce qui est le cas. Les demandes en stages de perfectionnement du pilotage n’ont jamais été aussi fortes ! Et si c’était le seul bénéfice que l’ULM pouvait tirer de cette initiative, il serait très largement suffisant !
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