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Fly to Dakar (septembre 2002)

Exculisivté Web

 

Fly to Dakar : Espagne, suite...

 

Mercredi 4 septembre 2002 : Manresa - Castello : 3 h 20

 

Pierre-Jean le Camus

 

 

Nous avons prévu de descendre directement vers la côte, en suivant la A 18 que nous quitterons vers Tarrasa pour une route au 225, afin d'éviter la CTR de Barcelone. Nous décollons sous des nuages accrochés mais épars, passons au ras des magnifiques aiguilles de Montserrat, puis nous collons sur l'autoroute. 

Pas trop vachable en-dessous… la côte, déjà visible, se rapproche bien à mon goût, mais je suis derrière, et suis notre équipage pilote comme décidé. Soudain, nous nous trouvons en conflit avec un gros porteur. Un regard à gauche, la piste de Barcelone est là en dessous, dont on peut observer les moindres détails et les nombreux trafics ! Piqué convaincu vers le sol, puis plein nord au ras de reliefs ; mmh, faudrait pas que le moteur sache où il nous mène, sans quoi il pourrait bien se mettre en grève.

Vers Vilafranca, nous reprenons une route vers la mer, que nous suivrons ensuite dans une aérologie de curé comme toujours en vol côtier, agrémentée d'un bon vent favorable. 

Nous en prendrons plein les yeux en coupant la pointe de Tortosa et ses milliers d'hectares de rizières. Je dois me faire violence, comme souvent, pour résister à la tentation de me poser là pour sentir et toucher ces immenses et humides platitudes. En poursuivant au sud, la côte n'est guère accueillante par endroits, comme dans la majorité de la péninsule Ibérique. Au bout de deux heures trente de vol, nous commençons à nous raconter des âneries avec Pascal, signe que la fatigue et la lassitude s'installent. 

Je ne comprendrai jamais comment font ceux qui sont capables de voler longtemps sur leur pendulaire. Je ne le suis pas, et me pose en général au bout de deux heures. N'importe où, pour peu bien sûr que le terrain s'y prêtât. Une plage, un champ, une route, peu importe, il faut que je rejoigne ma terre pour quelques instants, le temps de me défouler, de respirer les odeurs locales, de voir des sourires, puis très vite fuir à nouveau vers le seul endroit où j’ai la paix. Il m'arrive même parfois de me poser plusieurs fois sur quelques kilomètres. Quelle machine fabuleuse que le pendulaire, qui offre cette particularité de pouvoir se poser court, décoller fort, et se jouant avec aisance des aspérités du sol, et ce sans avoir besoin d'être champion du monde. Quelle chance de vivre une telle époque, et de savoir utiliser ce truc !

Vers Vilafranca, nous reprenons une route vers la mer, que nous suivrons ensuite dans une aérologie de curé comme toujours en vol côtier, agrémentée d'un bon vent favorable. 

Nous en prendrons plein les yeux en coupant la pointe de Tortosa et ses milliers d'hectares de rizières. Je dois me faire violence, comme souvent, pour résister à la tentation de me poser là pour sentir et toucher ces immenses et humides platitudes. En poursuivant au sud, la côte n'est guère accueillante par endroits, comme dans la majorité de la péninsule Ibérique. Au bout de deux heures trente de vol, nous commençons à nous raconter des âneries avec Pascal, signe que la fatigue et la lassitude s'installent. 

Je ne comprendrai jamais comment font ceux qui sont capables de voler longtemps sur leur pendulaire. Je ne le suis pas, et me pose en général au bout de deux heures. N'importe où, pour peu bien sûr que le terrain s'y prêtât. Une plage, un champ, une route, peu importe, il faut que je rejoigne ma terre pour quelques instants, le temps de me défouler, de respirer les odeurs locales, de voir des sourires, puis très vite fuir à nouveau vers le seul endroit où j’ai la paix. Il m'arrive même parfois de me poser plusieurs fois sur quelques kilomètres. Quelle machine fabuleuse que le pendulaire, qui offre cette particularité de pouvoir se poser court, décoller fort, et se jouant avec aisance des aspérités du sol, et ce sans avoir besoin d'être champion du monde. Quelle chance de vivre une telle époque, et de savoir utiliser ce truc !

 

On nous avait prévenus de la nombreuse présence d'avions épandeurs sur l'aérodrome de Castello, qui sont bien là. Par ailleurs, la piste est immanquable, qui termine sa course droit sur la ville en bord de plage, sur un rond-point. Une ancienne bande en herbe existe, plus orientée dans le vent de ce début d'après-midi. 

Nous la choisissons, parquons nos machines sous un soleil de plomb, et sortons comme le veut désormais le rituel le linge lavé la veille afin de le faire sécher sur les haubans. Que les ingénieurs qui rient devant nos enchevêtrements de câbles continuent de puer ! Je vais m'enquérir des possibilités d'avitaillement : "tienes un plan de vuelo ?" - Aïe, ça commence. "No, senior, no tengo porque no es nesesario - Muy bien !" L'homme m'apprend alors que les cuves sont vides, et le temps de les remplir il faudra attendre quelques heures avant que de pouvoir y puiser le précieux nectar. De toutes manières, de nombreux orages nous encerclent, nous décidons de rester ici pour la nuit. Après avoir sacrifié à l'incontournable et bienfaisante tradition de la sieste, nous trouvons le jeune instructeur du club, qui parle un français parfait, tout juste relevé d'un léger et agréable accent : "ma mère est française". 

Ce Franpagnol nous amène à la station la plus proche, que nous n'aurions guère aimé rejoindre à pieds, car elle est bien loin. S'ensuit un léger conflit avec un pilote local, qui refuse que nous parquions nos appareils à côté de SON bimoteur. Peu importe, les autres membres du club nous font comprendre que cet individu est irrécupérable, et nous invitent à attendre qu'il soit parti. Nous décidons d'aller à la plage, mais avant cela il nous faut mettre nos ailes au sol. Nous pestons un peu à l'idée que nous pourrions parquer nos machines à l'abri sans les démonter si ce monsieur était humain, mais bon, ici comme ailleurs "il y a peu de chances qu'on détrône le roi des cons…" L'eau est bonne, il n'y presque personne, le moment est agréable. Deux jeunes filles à la peau ambrée se baignent tout près, nous entreprenons inconsciemment et sournoisement une attaque oblique et progressive, faisant mine de sautiller dans les vagues. Les sirènes rient en comprenant notre manège, mais s'en vont bientôt, peut-être lassées de notre trop grande patience. Je rassure mes collègues en assénant une de ces vérités toutes faites qui ralentiront encore longtemps la progression de l'intelligence humaine : "les espagnoles, elles t'allument, tu te fais des plans, et puis hop, adios, c'est tout !" Il commence à faire nuit. Nous prenons le chemin du retour dans notre tenue de plage, quand tout à coup des cris enthousiastes et hauts perchés sortent d'une auto, auxquels nous répondons par de grands saluts. La voiture fait demi-tour, nos hormones libidiques sont en émoi, mais crac, l'auto nous repasse devant sous des cris encore plus puissants…il est des idées reçues qui ne sont pas infondées. Nous nous consolons en nous invitant mutuellement à la sagesse. Chaque chose en son temps, pour l'instant nous allons à Dakar, les études morphologiques de la gent féminine espagnole sont remises à plus tard. Nous dormirons dans le hangar après avoir dévoré toute la carte d'un bar à Tapas. Avant de rejoindre ce lieu, nous nous sommes lavés sous le jet d'eau mis à notre disposition dehors, dans la nuit et dans le plus simple appareil. Il me semble alors que nous vivons un moment important de notre périple. Nous sommes désormais quatre vrais amis, maintenant que nous nous sommes mutuellement décrassés, nus dans la nuit. 

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